Q : Quel est ton rôle à Chûô ? R : Hiro est professeur de peinture dans la faculté des arts depuis la rentrée 2021. C'est donc un petit nouveau, encore jeune, qu'on confond souvent avec un étudiant perdu dans des couloirs où il ne devrait pas traîner...
Q : As-tu une autre activité à côté du travail ?R : Oui, vu que les cours de peinture ne sont pas aussi fréquents que des cours de langue ou autre, il ne bosse pas tous les jours et son salaire s'en ressent. Il a donc un second job comme assistant de la mangaka KIKA.
Q : Quel est l’endroit où on risque le plus souvent de te trouver sur le campus ?R : Dans ses salles de classes, évidemment ! Mais, entre deux cours, Hiro se trouvera probablement dans son bureau ou, les jours de beau temps, à l'extérieur pour croquer un paysage, réel ou imaginaire.
Q : A Chûô, est-ce que tu supervises clubs ou des cercles ?R : Pas encore. Étant tout nouveau, il préfère d'abord se consacrer à ses cours et ses étudiants, mais cette éventualité n'est pas inenvisageable pour l'avenir.
Q : Tu vis à Seiseki ou dans la capitale ?R : Hiro habite à Seiseki, dans un appartement du quartier de Sakuragaoka. Son logement est assez vaste, avec une chambre pour son cadet quand il lui rendait visite. Et il possède un chat, un magnifique Kuro au pelage noir comme l'ébène.
Q : Tu te décrirais comment en quelques mots ?R : Pour Hiro, il y avait un avant et un après l'
incident.
Avant, il était un ado comme un autre, un jeune joyeux qui regardait passer les filles avec un sourire, qui sortait avec ses potes pour boire des coups et s'amuser. Il avait une bande d'amis assez complète, avec pas mal de mecs et quelques nanas avec qui il faisait la fête à la moindre occasion. Il faisait des câlins à ses parents et se montrait parfois arrogant, il ébouriffait les cheveux de son petit frère quand ils se croisaient et disait avec un sourire tendre à quel point son existence lui était
in-su-por-table.
Avant, il aimait faire du sport, étudiait le strict minimum pour les cours et la peinture était un hobby. Il rêvait de devenir sportif, peut-être danseur classique, un autre de ses passe-temps pour lequel il était doué. Il avait une bonne santé, une vie saine, un corps avec des proportions normales, ni trop gros, ni trop maigre. Il était même plutôt beau, avec ses traits chinois hérités de sa mère, et il avait une petite amie avec qui il envisageait un futur radieux.
Mais,
après, Hiro n'a plus été le même. Traumatisé par l'
incident, il aurait du se renfermer sur lui-même, s'isoler, peut-être même sombrer dans la dépression. Mais sa nouvelle infirmité, au lieu de le tirer vers le bas, lui donna une raison de se battre. Il ne pouvait plus faire de sport intensif et accueilli cette nouvelle avec résignation. Il ferait du dessin son métier, en ce cas ! Il se montrait calme la plupart du temps, plus sage et mature qu'avant, mais son infirmité lui en faisait voir de toutes les couleurs. Parfois, il lui prenait des crises de colère irrationnelles, à cause de la douleur, de la mauvaise gestion de ses médicaments. Parfois, la réalité le frappait et il sombrait dans la déprime, la détresse dans sa forme la plus pure. Heureusement, la plupart du temps, il se gérait et gardait une humeur stable, lui permettant de vivre une vie normale, ou presque.
Socialement parlant,
après, il du faire un tri dans ses relations, même si cela se fit principalement naturellement. Certains s'éloignèrent de lui, d'autres s'accrochèrent. Il se créa un cercle d'amis en qui il avait confiance, ceux qui étaient restés, qui l'avaient soutenu. Sa magnifique petite amie ne faisait pas partie du lot, ayant profité de son absence pour se consoler dans les bras d'un autre. Bon débarras ! Il cessa également d'être arrogant envers ses parents, se montra plus affectueux avec son cadet. L'
incident aurait pu le tuer, et la pensée qui le hantait le plus était de se dire que ses proches ne savaient probablement pas à quel point il tenait à eux. Alors il avait décidé de leur montrer.
Q : Et finalement, dis-nous en un peu plus sur ton parcours jusqu’à aujourd’hui.R : Hiro est né de parents de cultures différentes, d'un père japonais et avocat et d'une mère chinoise et galeriste venue au Japon pour des vacances et tombée enceinte de son amour passager. Cette dernière n'avait jamais prévu de s'installer dans un autre pays que le sien, surtout pas pour un homme qu'elle n'était pas censée revoir après ses vacances, mais le test positif qu'elle fit après des jours et des jours de nausées matinales remit ses perspectives en question. Son enfant méritait de vivre avec ses deux parents, le père était un homme bien et les offres d'emploi au Japon étaient plutôt riches. Alors, après une discussion avec le jeune Nishimura, elle s'installa avec lui, où leur amour évolua en même temps que leur aîné grandissait.
Cinq ans après Hiro naquit un second fils, le fruit cette fois d'un amour véritable plutôt que d'un crush passager. Le plus grand accueilli ce nouveau petit être avec joie, même si son état d'esprit tourna quand on lui demanda de changer sa couche ou quand il se faisait réveiller cinq fois dans la même nuit par ses pleurs. Heureusement, le deuxième grandit aussi et se calma, jusqu'à devenir un compagnon de jeu pour Hiro.
À l'école, le jeune métisse se faisait mille amis, toujours souriant et joyeux. Il attirait les autres comme un aimant et était toujours entouré. Pas forcément la star de l'école ni le chouchou, juste un gars sympa que tout le monde appréciait. Il se disputait rarement avec les autres enfants et était plutôt du genre à partager son goûter pour faire la paix avec eux. De plus, son visage typiquement chinois lui attirait la curiosité des autres : savait-il parler cette langue ? Était-il étranger ? Avait-il de la famille là-bas ? Les réponses étaient non, non et oui. Car sa mère ne parlait que japonais à la maison et n'avait appris que quelques mots de survie en chinois à ses fils (bonjour, merci, au revoir, où sont les toilettes ?). Car sa nationalité était japonaise. Car la famille de sa mère ne l'avait pas suivie dans sa folle aventure.
L'
incident survint quand Hiro était au lycée. Il était à une fête chez des amis, et avait trop bu, comme souvent, bien que légalement trop jeune pour cela (merci monsieur Sato d'avoir une cave à vin bien remplie). Il décida de rentrer en taxi, l'heure étant si tardive que ses parents dormaient probablement et il ne voulu pas les réveiller pour venir le chercher. Il avait quinze ans et trois mois, c'était le quinze février, date à jamais gravée dans sa mémoire. Trop jeune pour être prudent, mais normalement trop âgé pour ignorer les dangers de la nuit.
Ses amis voulant rester un peu plus longtemps, ce fut seul que Hiro entra dans son taxi et donna l'adresse de ses parents, dans Kyoto. Puis, assommé par l'alcool, il s'assoupit contre la vitre, faisant confiance au chauffeur pour le ramener chez lui sain et sauf. Mais le jeune adolescent ne se réveilla pas devant sa maison, ni même en chemin. Quand il ouvrit les yeux, il était dans un hangar désaffecté, une sale crasseuse et sombre, allongé sur de la paille et les mains attachées dans le dos.
Par mécanisme de défense, il oublia à peu près tout ce qui lui arriva pendant les deux semaines où il resta captif. Ou bien était-ce la drogue qui bloquait ses synapses ? Ce dont il se rappelait, c'était ces mains froides qui lui tenaient le bras pendant qu'on lui injectait une drogue dont il ignorait tout à l'époque. Quand il y repensait, il se voyait aussi boire de l'eau, manger du pain sec, mais rien de concret, pas même un visage ou une voix. Il n'était pas mal traité, n'était pas torturé, violé, affamé, juste drogué contre son gré en attendant que son père paie une rançon. Il ne se rappelait même pas de son sauvetage, trop shooté par la drogue pour réaliser ce qui lui arrivait.
Hiro se réveilla donc à l'hôpital, une perfusion dans le bras et des visages inquiets penchés sur lui. Des examens avaient démontré que la drogue qu'on lui avait injectée était de la cocaïne, administrée par le fils d'un dealer envoyé en prison par son père, et mort lors d'une bagarre quelques semaines plus tôt. Pas de bol, le gars avait décidé de se venger sur Hiro...
Directement après son hospitalisation, il fut envoyé dans un centre de désintoxication en Chine pour essayer d'éliminer la drogue, mais son corps ne réagit pas de façon attendue. Il avait reçu des doses tellement fortes et régulières que le manque était insupportable pour Hiro. Son corps convulsait, son coeur ralentissait, il manquait de mourir à chaque tentative. Petit à petit, il parvint à se débarrasser des dernières traces de drogue, mais son corps avait tellement souffert qu'il en aurait des séquelles.
Il resta près de trois mois dans le centre avant de finalement pouvoir rentrer chez lui. Les effets de l'
incident étaient une fatigue constante, des essoufflements au moindre effort, crises de toux. Parfois, il était tellement faible qu'il ne pouvait quitter le lit, et un traitement médicamenteux dû lui être prescrit pour lui permettre de vivre normalement. Les médecins lui conseillèrent tout de même de se ménager, d'arrêter le sport intensif et de mener une vie plus paisible afin d'éviter de surmener son corps. Fini la danse classique, qu'il pratiquait depuis plusieurs années et lui garantissait une belle carrière.
Hiro ne se laissa cependant pas sombrer et décida d'aller de l'avant. Sa copine l'avait trompé pendant sa cure ? Tant pis pour elle. Certains de ses amis se moquaient de sa faiblesse ? Qu'ils s'en aillent alors ! Il ne pouvait plus danser ? Alors il se trouverait une autre passion. Pendant les dernières années du lycée, il se lança dans l'art de façon plus sérieuse que de simples croquis sur ses cahiers. Il dessinait, peignait, s'exprimait à travers ses tableaux, tantôt sombres et glauques, tantôt joyeux et colorés.
Il changea physiquement, aussi, perdant énormément de poids tandis que son teint virait au gris maladif, ses yeux constamment cernés. Il ressemblait à un zombie ou... un toxicomane. Mais il ne voyait pas sa condition comme un mal honteux, n'en étant pas responsable. Il en parlait ouvertement, la considérait comme une maladie et ne s'en cachait pas. Il avait été drogué, et il devait prendre une dizaine de médicaments par jour pour tenir le coup. Les gens acceptaient ou non, et Hiro accueillait leur jugement avec un haussement d'épaules.
Au moment de choisir une université, il opta pour Chûô, ce qui le força à quitter le domicile familial et la protection de ses parents. Il logea d'abord à la résidence Seiseki pendant deux ans, puis se trouva un appartement dans Sakuragaoka, que ses parents lui payèrent jusqu'à la fin de ses études. Une fois son diplôme en poche, il postula à Chûô pour un job de professeur, au cas où. Et il fut pris, directement.
Cependant, les cours de peinture n'étaient pas ce qui se faisait le plus souvent et n'étaient même pas une option très répandue parmi les autres facultés. Afin de gonfler un peu son salaire, il chercha un job à-côté, un supplément qui aiderait pour les fins de mois. C'est ainsi qu'il devint l'assistant de la mangaka KIKA, aidant dans les dessins plus que dans les scénarios.