Le monde des affaires japonais était extrêmement compétitif. C’était quelque chose qui avait toujours allumé un Kazuaki qui n’avait pas choisi de poursuivre cette voie juste pour faire plaisir à son père. C’était un vrai plaisir pour lui de traiter avec des requins, comme lui. Il aimait les défis et il était le genre d’homme qui ne lâchait jamais rien. Quand on parlait de stagiaires, ça pouvait être exactement pareil. Il y avait ceux qu’on envoyait chercher le café… et ceux pour lequel on s’était battu parce qu’une fois gradués, il était évident qu’ils allaient être un atout considérable pour l’entreprise. Kazuaki, qui donnait des conférences à l’université d’où il avait lui-même gradué, ouvrait toujours l’œil pour y trouver de jeunes prodiges. Et il croyait en tenir un, cette année…

Noshimuri Ren fréquentait la faculté de commerce comme lui-même l’avait fait quelques années plus tôt. Il était allumé et malin. Le père Nakajima ne comprenait pas encore pourquoi il intéressait à ce point son fils, mais c’était un détail puisqu’il lui laissait le champ libre. Aujourd’hui, Kazuaki allait parler stage pour la première fois au jeune homme. Ils avaient discuté à de nombreuses reprises depuis quelques temps. Il aimait savoir à qui il s’adressait avant de trop s’avancer. Il en profitait d’avoir eu un rendez-vous dans un restaurant pas très loin d’ici pour le dîner pour venir voir si Noshimuri était dans le coin.

Le trouver n’est pas difficile. Il était dans l’aile réservée aux cours des étudiants de commerce, forcément. Kazuaki jette un coup d’œil à sa montre après s’être assuré que le cours dans lequel il croyait l’avoir aperçu était bel et bien le bon. Il ne restait probablement qu’une dizaine de minutes au cours, vu l’heure. Et si ce n’était pas le cas, il reviendrait un autre jour. Mais rapidement, le raclement des chaises se fait entendre en même temps que des voix s’élèvent dans la salle de classe, étouffant la fin de ce que l’enseignant disait. La porte s’ouvre et justement, le premier qui sort s’avère être Ren.

« Eh. », fait Aki pour attirer l’attention de l’étudiant. Il a un clin d’œil pour lui lorsque le joli regard en amande où brille un peu d’interrogation se pose sur sa personne. « Tu as un autre cours ? Sinon, je suis sûr que tu as du temps libre pour moi. »

Kazuaki était de ces hommes qui ne doutaient de rien ! En même temps, il représentait beaucoup dans le monde des affaires. Il aurait été fou de ne pas en être conscient, au moins un minimum.

« Tu as mangé ce midi ? Sinon je t’invite. », propose finalement le Japonais tout en ayant un petit signe de la tête pour la direction qu’il prend ensuite, invitation muette à le suivre. « Alors ? Les professeurs ont commencé à vous parler de stages ? »

Il n’était pas réputé pour tourner autour du pot. Sauf quand il voulait taquiner, mais il n’était pas là pour ça.

Ren dégageait cette impression de nonchalance qui, Kazuaki l’espérait, devrait techniquement disparaître lorsqu’il prendrait de la maturité et un peu d’expérience dans le domaine. Un homme d’affaires devait toujours se montrer en pleine possession de ses moyens, ferme et capable. Présentement, Ren ne lui donnait pas une autre impression qu’un gamin qui s’était endormi au milieu de sa leçon ! Mais ils en reparleraient plus tard, si le jeune homme finissait bel et bien sous sa tutelle pendant ce stage qui intéressait Kazuaki. Pour l’heure, il se contente d’avoir un petit sourire en coin devant l’attitude du garçon, à mi-chemin entre l’amusement et la moquerie pas bien méchante.

« Le cours est terminé. Tu peux te réveiller maintenant. », taquine le vice-président de la SK tout en faisant un petit clin d’œil amusé à Ren. Il retrouve néanmoins son sérieux assez rapidement quand son invitation est acceptée. Enfin, c’est comme ça qu’il le prend. Il était de ces hommes qui n’attendaient pas un « oui » clair avant de foncer. Il n’y avait pas de temps à perdre dans cette vie. « Parfait. »

C’était donc réglé : ils allaient manger ensemble. Enfin. Ren allait manger. Lui l’avait déjà fait et se contenterait d’un café pour ne pas faire grimper son entraîneur aux rideaux la prochaine fois qu’ils calculeraient son IMC. Il hausse les épaules quant à l’endroit où ils iraient, ignorant pour le moment la question du stage. Comme la plupart des hommes d’affaires dans ce coin du globe, on ne parlait affaires que dans une situation donnée et le repas était l’une d’entre elles.

« Décide. Je ne vais prendre qu’un café. J’ai déjà mangé. J’ai eu un repas d’affaires. », explique Kazuaki, sans entrer dans les détails même si Ren était probablement une des rares personnes qui ne s’étoufferait pas d’ennui s’ils en parlaient. Disons juste que les affaires, c’était souvent plutôt secret. Trop d’informations sensibles. Il aimait bien quand personne ne savait où la SK allait très précisément. Les investisseurs avaient juste assez d’information pour dormir sur leurs deux oreilles et tout le monde était heureux. « On va pouvoir discuter une fois là-bas. »

Ce disant, le tatoué prend la direction de la sortie la plus près, connaissant encore cet endroit comme le fond de sa poche. Il avait vraiment passé de bons moments à Chuo.

« Alors, la session n’est pas trop difficile jusqu’à maintenant ? », demande-t-il tout en jetant un regard curieux à Ren. Il ne se souvenaient plus si les examens avaient commencé ou pas à ce moment-ci de l’année. Ça pouvait vite devenir une plaie. « J’avoue que l’Université n’a pas trop empiété sur ma vie sociale. Sauf en période d’examens. Là, je disparaissais de la surface du globe et on ne pouvait espérer me revoir que trois jours après le dernier. Je dormais comme une marmotte quelques jours, puis c’était ma renaissance et hop, de retour en boîte toute la nuit… »

À chacun de gérer le stress, la surcharge de travail et l’accomplissement académique, disons !