C’était une matinée comme une autre. Yûji s’était levé tôt comme à son habitude, avait pris un thé en observant la nature par la fenêtre de son appartement, puis s’était préparé et avait filé en direction de l’université Chûô. Il s’était petit à petit habitué à sa routine et même s’il ne comptait pas faire de vieux os à la fac, et continuait à éplucher les offres de rôles de comédiens et acteurs, il savourait quand même son temps dans le campus. Comme les arts n’était pas une majeure à Chûô, originalement fac de droit, il n’y avait pas énormément de cours de théâtre et il était d’ailleurs le seul prof pour le moment. Parmi les matières artistiques, le théâtre était loin d’être la plus demandée, ainsi il n’avait que deux ou trois groupes par semaine, et donc beaucoup de temps libre pour auditionner. Pourtant, il ne trouvait rien qui le fasse vraiment vibrer. Il allait devoir revoir ses exigences à la baisse, ou se faire des contacts dans le milieu …

Dans la salle des profs, à son arrivée, il avait croisé Onodera Momiji, un prof d’anglais. Yûji avait tendance à squatter les bâtiments de littérature et langues pour se poser entre deux cours quand il devait préparer des contenus ou corriger des copies, puisqu’il n’y avait pas de bâtiment artistique à proprement parler. Sa blessure au poignet était guérie, ça n’avait vraiment pas duré longtemps. Les deux collègues n’étaient que deux dans la salle, et le professeur d’anglais avait interpellé Yûji pour lui proposer de manger ensemble ce midi. Surpris de ce genre de requête alors qu’ils se connaissaient à peine, le nippon avait haussé les épaules et accepté poliment sans plus de cérémonie. Il préférait manger seul et profiter du calme avant la tempête, mais sans doute que cet Onodera avait quelque chose à voir avec lui. Il ne chercha donc pas à comprendre outre mesure.

La matinée défila assez rapidement et il se retrouva assez tôt dans la cafétéria des professeurs, dans le bâtiment administratif. Il prit un plat de kitsune udon très basique et s’installa à une table au hasard. Il ne savait pas quand l’autre arriverait, mais au moins il était posé et au chaud. Mais le temps de retirer son manteau et de boire un peu d’eau et voilà le décoloré qui s’installait en face de lui.

« Re-bonjour. C’était tranquille, oui, et vous ? »

Les deux collègues se vouvoyaient. Après tout ils se connaissaient à peine, et cela intriguait Yûji que ce dernier veuille déjeuner avec lui.

« Vous vouliez me voir pour quelque chose en particulier ? »

Peut-être une sorte de collaboration entre ses cours d’anglais et ceux de théâtre ? Peut-être qu’ils étaient en train d’étudier du Shakespeare, et qu’il voulait faire une rencontre ou des exercices croisés, qui sait. D’ailleurs si ce n’était pas pour cela qu’il venait, c’était une idée intéressante à soumettre.