Noah était arrivé en avance par rapport à la rentrée, mais ce n'était pas plus mal en soit, car cela lui laissait le temps de visiter un peu le campus et de prendre ses marques. Il avait bien entendu fait un tour à la bibliothèque, ouverte même en dehors des périodes scolaires. Il se plongeait un peu plus dans les bouquins, tapant surtout dans ceux en anglais pour comprendre ce qu'il allait étudier et continuant de s'entrainer en Japonais afin d'un peu mieux comprendre et s'exprimer dans la langue du pays où il se trouvait.

Ses parents, surtout sa mère, l'avaient mit en garde sur le fait que les moeurs étaient différentes ici et qu'il devrait se faire discret. Si la Corée restait assez fermée sur certains sujets, cela semblait parfois pire au Japon, Noah avait donc tenu au silence son orientation sexuelle ou même le fait qu'il était amnésique à cause d'un accident. N'ayant de toute façon pas de souvenir de ce dernier, donc il ne pourrait pas en dire grand chose.

Le manager de la résidence lui avait parlé d'une tradition, le fait de récupérer des affaires d'anciens étudiants laissées dans la communication room. Et comme il serait bientôt l'un des nouveaux pour la prochaine rentrée, il pouvait donc lui aussi prendre quelque chose resté sur place. Remerciant l'homme, il se dirigea vers la fameuse pièce et entra pour regarder un peu autour de lui.

En s'approchant des affaires disponibles, il regarde un peu ce qui s'y trouve et esquisse un fin sourire en voyant un cuiseur à riz. C'était peut être un peu trop pour lui seul, mais ça lui serait bien pratique tout de même. Et puis, ça lui rappellerait la maison, quand sa mère mettait le leur en marche. Mélangeant les épices durant la cuisson, ce qui répandait une bonne odeur dans la cuisine. Mais, alors qu'il posait une main sur la hanse, deux autres mains l'attrapèrent au même moment.

- Oh..

Relevant les yeux, il remarque un autre jeune homme, qui semble le vouloir également. Noah reste une seconde à le regarder, avant de relâcher sa prise et incliner doucement la tête.

- Excusez moi..

Articulant bien pour être sur de ne pas se tromper dans les syllabes de son Japonais un peu bancal encore.

Le grand retour à la résidence Seiseki avait sonné pour Hideki. Il y avait passé 3 ans, et avait fini par se prendre un studio pour plus d’indépendance et de calme, pour écrire ses romans. Sauf que la vie en avait décidé autrement : cumuler des études supérieures, un petit job nécessitant de se crever la santé sur un vélo tous les jours, et l’écriture de son roman pendant les creux de ses journées remplies, ça ne faisait pas bon ménage. Le surmenage avait fini par le gagner et il avait fallu dire stop à quelques engagements. Déjà, il finirait son master en éducation en deux ans, ce qui lui laissait encore une année entière pour rédiger et peaufiner son mémoire. Il aurait moins de cours à suivre puisque ce seraient les mêmes que l’année précédente. Ca lui dégagerait du temps libre. Il aurait pu arrêter le club de Volley mais c’était important pour Hideki d’avoir une activité en commun avec son frère. Il avait donc cessé d’être facteur à mi-temps, ce qui impliquait une baisse de salaire. Ses revenus de romans n’étaient pas encore suffisants. Il s’était donc résigné à retourner à la résidence et chercherait un job moins chronophage dès que possible.

Mais ce retour ici ne déplaisait pas au jeune fanfaron : il avait toujours aimé vivre ici, et le côté communautaire avait quelque chose de rassurant. Puis ça pourrait l’inspirer pour des backgrounds de personnages qui sait. Il y avait de tout ici, en termes de caractères et personnalités.

Pour l’heure, il venait de finir de transférer ses affaires de son studio à ici. Il faudrait qu’il retourne faire du ménage pour l’état des lieux sortant en fin de semaine. Quelle plaie, il détestait le ménage …
Hideki se souvint que sur cette période de transition entre les anciens étudiants et les nouveaux, il y avait cette tradition de laisser des affaires en libre-service. Il y avait bien un objet qu’il aimerait bien éviter d’acheter, et qui lui avait manqué pendant son année en solo : un cuiseur à riz. Il n’avait jamais pris la peine d’en racheter un après que le sien ait rendu l’âme, paresseux qu’il était. Alors peut-être qu’un ancien résident aurait laissé le sien ?

Le jeune romancier se rendit donc à l’étage inférieur au sien, en direction de la Communication Room. Il y avait vraiment plein d’objets partout. C’était la seule période où la pièce japonaise était ouverte en continu aux résidents. Une fois la période d’emménagement passée, il faudrait la réserver pour faire des soirées étudiantes. Il avait hâte de retrouver cette ambiance bon enfant. Même s’il risquait d’être trop souvent enfermé à double tour dans son studio pour écrire …

Hideki n’avait pas vu qu’il y avait une autre personne qui était entrée juste après lui. La porte étant ouverte, et comme il avait ses écouteurs dans les oreilles avec de la musique, il n’avait pas prêté attention au nouveau venu. Il aperçut le saint Graal, posé sur la table basse de la salle. Il se dirigea vers lui, et au moment où il allait s’en saisir, une autre personne avait eu la même idée. Hideki fit un brusque retour à la réalité, leva les yeux et vit un jeune homme aux cheveux blond platine qui semblait intéressé par le cuiseur à riz. Ce dernier s’excusa aussitôt en japonais. Hideki, bille en anglais et prenant pour acquis que si son interlocuteur lui parlait en japonais, ce serait ok, répondit dans sa langue natale :

« Ah, non c’est moi qui suis désolé. Tu peux prendre le cuiseur à riz si tu veux. »

Hideki se doutait qu’il était un étranger venu étudier au Japon pour l’année à venir. Ce serait donc plus difficile pour lui de se pointer dans un magasin de cuisine comme une fleur et d’acheter un cuiseur à riz adapté. Il ne pouvait peut-être pas lire les kanji … Il pouvait donc totalement lui céder l’objet. Puis il décida de faire une blague, qui ne serait peut-être pas comprise par le blond :

« Et au pire, je viendrai faire cuire mon riz chez toi hein ! »

Bah bien sûr Hideki. Bon, il ne pouvait pas se douter en faisant cette blague que ce blond était quasiment son voisin, et qu’ils n’avaient qu’une seule chambre d’écart. D’ailleurs, il allait rigoler fort en découvrant qui était sa voisine …

La porte grande ouverte, il était entré comme lui avais proposé de le faire le manager en bas. Ne remarquant pas vraiment l'autre garçon déjà présent, faisant un peu le tour de la pièce et des objets présents. Se demandant ce qui pourrait bien lui être utile, sachant qu'il avait déjà tant de choses dans sa chambre. Mais aussi, qu'il aurait de toute façon largement les moyens de se permettre d'acheter ce qui pourrait lui manquer.

Approchant finalement de la petite table, il remarque un cuiseur à riz et esquisse un sourire en repensant à la cuisine de sa mère. C'était certains que ça allait lui manquer.. Non pas qu'il soit mauvais cuisinier, mais c'était toujours différent, n'est ce pas ? Noah tendit la main pour l'attraper, mais remarqua alors qu'un autre étudiant avait déjà posé les siennes dessus aussi. S'excusant aussitôt en Japonais, il le lâcha.

- Je..

Il se mord un peu la lèvre, ayant même utilisé le féminin pour se désigner tout en cherchant ce qu'il pourrait lui répondre. Pas certains même d'avoir comprit toute la phrase prononcé par l'autre jeune homme. Et d'ailleurs, il enchainait sur autre chose, parlant de riz s'il ne se trompait pas.

" Je suis désolé, mais pourriez vous parler moins vite, s'il vous plait ? J'ai encore un peu de mal avec le Japonais.."

L'Anglais était finalement plus facile pour lui et au moins il ne faisait pas d'erreur dans ses phrases. Parlant assez lentement, juste au cas où le niveau de son interlocuteur ne serait pas au même stade que le sien. Après tout, c'était sa langue de naissance, bien qu'il parle également parfaitement le Coréen.

" Vous pouvez le prendre, je saurais m'arranger autrement, ne vous en faites pas. "

Un sourire emplit de douceur et de bonne volonté vient étirer ses lèvres, lui faisant signe de prendre le cuiseur à riz. Ce n'était pas comme si cela lui serait indispensable de toute façon. Et puis, il pourrait en trouver un dans une petite boutique du coin. Ca lui donnerait l'occasion d'aller se promener un peu en dehors du campus. Ce qu'il n'avait pas fait depuis son arrivée au Japon encore.

Hideki avait vraiment le don de se mettre dans des situations délicates et hasardeuses. Cette journée n’avait pas loupé. De tous les objets qui auraient pu attirer son attention dans cette salle, il avait fallu qu’il mette le grapin sur le même qu’une autre personne. Non mais vraiment, il vivait un drama parfois. Est-ce que la poisse collait à la peau des enfants Yamada depuis la nuit des temps ? M’enfin, peu importe, ça ne pouvait pas être pire, si ? Il venait de lui dire qu’il pouvait prendre le cuiseur à riz, et avait même fait une blague pour détendre l’atmosphère. Mais en fait si, ça pouvait être pire.

Il se trouvait que son interlocuteur avait du mal avec le Japonais. Bien plus que ce que Hideki s’était innocemment imaginé. Il venait donc de lui répondre dans un anglais lent, pour être sûr que le japonais comprenne. Et intérieurement, il lui en était reconnaissant. En tant qu’étudiant dans la faculté de lettres et qui plus est, dans l’éducation pour devenir professeur, il avait des cours d’anglais obligatoires à suivre. Son niveau n’était pas trop mauvais, quoique très scolaire. Mais l’oral était une catastrophe pour lui. Il ferait mieux de remettre un peu les pieds au cercle de discussion en anglais … Il avait donc froncé les sourcils en écoutant le discours de son interlocuteur. Il n’avait pas tout saisi dans son intégralité mais pensait avoir compris l’essentiel. Le blond en face de lui ne maîtrisait pas encore le japonais. Hideki chercha un peu ses mots, et finit par répondre dans un anglais avec un fort accent japonais :

« Pas de soucis, je comprends. Je parlerai plus lentement ! »

Il lui sourit sincèrement, pour montrer sa bonne volonté. Il espérait que ça ne ferait pas trop flipper le jeune homme de voir que la conversation entre semblait complexe.
La suite de la conversation, en anglais toujours, fut tout aussi sportive pour Hideki. Autant, s’il lisait de l’anglais écrit, il s’en sortait plutôt pas mal, autant l’oral et les intonations étaient plus délicates pour ses oreilles peu habituées. En plus, ce type avait un accent très particulier et il serait bien incapable de déterminer de quel pays anglophone il venait. Mais ce n’était pas de l’anglais américain comme ce qu’il pouvait entendre dans les pistes audios de ses cours de langues. Il ne pouvait pas différencier les accents, juste que pour le coup, comprendre le jeune homme était encore plus difficile que prévu. Mais dans l’idée, il comprit que le blond souhaitait lui céder le cuiseur. Hideki agita les bras et répondit, maladroitement et toujours en anglais :

« Ah ! Euh … Non ! C’est bon ! Je n’en ai pas besoin, finalement. »

Pas très à l’aise avec l’anglais, le nippon n’avait même pas remarqué que son interlocuteur lui parlait de manière polie. Pourtant, à coups de « could » et « would », il aurait dû capter. Bon, d’un autre côté, Hideki était sans doute plus âgé que lui. Son parcours était tellement éclectique qu’il avait au final déjà 27 ans et n’avait toujours pas fini la fac. Dans un parcours normal, on finissait le master autour de 24 ans, mais il avait fait une année sabbatique et faisait sa 2ème année en deux ans. Quelle aventure …

« Au fait, je m’appelle Hideki. Et toi ? Tu es nouveau ici ? »

Même avec sa maladresse, Hideki restait poli et naturellement curieux envers les autres. Il était toujours ravi de rencontrer de nouvelles têtes, et ce type avait l’air sympathique.

(du coup mes codes c'est le contraire de toi, j'écris toutes mes paroles en gras par défaut donc j'ai mis l'anglais en italique ahah)

Noah n'a jamais eu autant de mal à communiquer avec d'autres personnes que depuis son arrivée au Japon.. Il s'y était attendu bien sur, mais c'était tout de même pire que ce qu'il aurait pu imaginer. Parlant donc en anglais, assez lentement et articulant la moindre syllabe. Espérant que son interlocuteur pourrait le comprendre.

Le soulagement peut sans doute se lire dans son regard lorsque l'autre étudiant lui répond dans sa langue natale, bien qu'un peu hésitant et très ponctué par l'accent Japonais. Mais au moins, le blond le comprenait ! Il lui rend bien volontiers son sourire, avec la douceur qui le caractérisait depuis plusieurs mois maintenant.

Noah lui fait savoir qu'il pouvait garder le cuiseur à riz. Il aurait bien l'occasion de s'en trouver un ailleurs ou même de simplement s'en passer. Ce n'était pas comme s'il ne savait pas cuire du riz avec une casserole après tout. Lorsqu'il s'en faisait pour lui seul à la maison, il n'utilisait pas leur cuiseur, bien trop gros pour ce cas là. Mais, le brun lui dit qu'il n'en avait pas besoin finalement, ce qui le surprend un peu, parce qu'il semblait assez déterminé lorsqu'il l'avait attrapé juste avant.

" J'insiste, prenez le. Vous en ferez certainement plus souvent usage que moi. "

Gardant un petit sourire aux lèvres, il l'écoute finalement se présenter et s'incline donc poliment comme on lui avait apprit qu'il fallait faire ici. Se présenter en Japonais, il savait faire ! Noah c'était entrainé tant et tant de fois, qu'il connaissait ses phrases par coeur maintenant.

- Je m'appelle Hwang Noah et je viens d'Australie. Je suis ici pour l'échange universitaire en cursus de langue.

Normalement, il n'avait pas fait d'erreurs. Du moins, l'espérait il. Se redressant et se passant une main dans la nuque. Ne sachant trop quoi dire de plus. C'était ce qu'il avait apprit dès son arrivée pour pouvoir se présenter sans trop de mal à n'importe quel Japonais qui lui demanderait. Réfléchissant un peu, il essaya de former une nouvelle phrase dans son esprit, avant de la dire à voix haute.

- Je suis dans.. la chambre 301. C'est au.. troisième étage. Et vous ?

Ses mots étaient un peu hésitants et il n'était pas certain d'avoir tout prononcé convenablement, mais il essayait tout de même. Hideki ayant fait l'effort de lui répondre en Anglais après tout.