mercredi 27 mars 2019 - Aux alentours de 14h

La rentrée scolaire était un événement qui n’avait plus préoccupé Ayame depuis quelques années. Quand on prend des cours à distance, la date de début importe peu ; on ne se prépare pas, on ne repasse pas son uniforme, ni son sac. On reste chez soi, et on attend que l’organisme daigne envoyer les leçons de cours. Ayame n’avait jamais vraiment apprécié cette période de solitude forcée, mais d’un autre côté, cela lui avait permis de souffler et d’exorciser quelques-uns de ses démons. A une époque, elle aurait été incapable d’aller d’elle-même dans un endroit rempli d’hommes ; aujourd’hui elle s’apprêtait à emménager dans une résidence où la moitié des habitants en était. Mais ça irait, car elle n’était pas obligée de leur parler en dehors des politesses basiques. Et Mia serait là. Elle ne la remercierait jamais assez d’avoir convaincu ses parents de la laisser s’installer à la résidence pour protéger Ayame.

Comme la jeune femme avait promis à sa mère qu’elle rentrerait tous les week-ends, elle ne s’était pas vraiment chargée en termes d’affaires, rentrant allègrement dans une seule grosse valise. Sans être minimaliste, Ayame ne possédait pas non plus une penderie à faire pâlir les stars hollywoodiennes.
Toujours est-il qu’elle se trouvait désormais face à l’entrée de la grande résidence, aux murs gris et verts. Impressionnée, le cœur battant, elle observait la porte qui la séparait de sa nouvelle vie, pleine d’indépendance, de surprises, mais aussi de démons. Il se passait rarement une nuit sans qu’elle se réveille en sursaut, hantée par les images de cette fameuse nuit où son monde avait basculé.
La jeune fille déglutit, puis poussa la porte. Comme c’était la période des emménagements, elle n’était pas verrouillée afin que les nouveaux puissent arriver à leur guise. Mais le manager veillait au bon déroulement des événements.

Il lui expliqua rapidement les consignes et le règlement de la résidence : pas de garçon dans les chambres de filles – ça l’arrangeait -, pas de possibilité d’héberger des gens sur place – ça n’était pas nécessaire, Mia avait sa chambre -, ne pas ouvrir à n’importe qui. Bien.
Désormais libre de ses agissements, Ayame avait pris l’ascenseur la menant à sa chambre. Numéro 303. Elle inséra la clef dans la serrure et la fit tourner. Elle découvrit ainsi un joli petit studio, spacieux et lumineux. Plus grand que sa chambre à Asakusa. Dans un style occidental.
Son premier réflexe fut de se jeter sur le grand lit moelleux, et de soupirer en observant le plafond. Elle avait fait le premier pas. Elle était heureuse de son choix, même si quelques doutes persistaient inévitablement.
Quelques minutes passèrent ainsi, sans que la nippone ne bouge. Elle finit par se reconnecter à la réalité, et réalisa qu’elle avait laissé la porte d’entrée ouverte ainsi que sa valise dans le couloir. Elle se hâta de ramener le lourd bagage à l’intérieur puis envoya un message à la hâte à Mia :

Ayame – 14h19
Hey ! Je suis arrivée à la résidence. Je suis à la chambre 303, et toi ? On se voit quand ?

Pendant la période d’ « enfermement » d’Ayame, Mia avait été la seule à venir lui rendre visite, elle avait perdu le contact avec la plupart de ses anciens camarades. Mais malgré tout, elles ne pouvaient pas se voir aussi fréquemment qu’elles l’auraient souhaité. Aya’ était donc ravie de retrouver son amie comme à l’époque de la seconde.

En attendant la réponse se son amie, elle entreprit de visiter la chambre : une petite salle de bains avec baignoire et sanitaires, une étagère pour entreposer des affaires, une machine à laver, un balconet donnant sur des résidences privées, et un coin cuisine. Un grand luxe pour la jeune étudiante ! Elle était agréablement surprise par les lieux, qu’elle avait passé l’été à essayer d’imaginer.

C'est bienôt la rentrée. Mia a l'habitude. Ce n'est pas la première. Mais cette fois elle a réussi à négocier avec ses parents pour avoir sa propre chambre à la résidence étudiante. Son père n'était vraiment pas pour, il ne veut pas qu'elle se mélange avec n'importe qui, toujours dans l'exagération. Heureusement que sa mère était là pour le temporiser, et le rassurer aussi peut être. Mia a promis qu'elle rentrerait tous les Week-end. Qu'elles donnerait des nouvelles souvent, sa mère va surement l'appeler tous les jours. Et ne parlons pas de Takeo qui la surveille encore plus que ses parents. Il est capable de faire le tour de tous ses voisins de palier pour les menacer. Leur dire de ne pas lui parler. Se faire des amis à la résidence risque d'être compliqué. Il va falloir être discrète.

Heureusement cette anée il y aussi Ayame. Mia a beaucoup utilisé cet argument pour convaincre ses parents. Ayame avait besoin d'elle. Ce qui en soit n'était pas tout à fait faux. C'était passé. Elle avait réussi et elle était contente. Magré tout elle aurait tout de même un semblant d'indépendance. Un petit peu, elle y croit, oui.  Elle s'est déjà bien installé, même si il lui manque encore des affaires. Elle aurait pu n'emmener qu'un peu de chose, mais Mia voulait toutes ses affaires, ou presque, avec elle.  Et le petit studio pouvait les contenir. Elle voulait vraiment se sentir chez elle, même si elle devait rentrer le week-end.

Il était bientôt quatorze heure. Mia savait que Ayame devait bientôt arriver. En attendant elle bouquinait sur son lit. Un livre de cours, oui. Quoi d'autre. Elle se devait d'avoir un bon niveau,ça faisait aussi parti du deal. Pas de notes en dessous de la moyenne. Pas une seule. C'était une pression assez énorme, mais peu importe. Pour Mia c'était faisable, et ça en valait la peine. Et alors qu'elle termina son chapitre son téléphone vibra, lui signalant un message. Synchronisation parfaite.

Elle sourit alors en le lisant et se leva rapidement. Chambre 303. Elle n'allait pas lui répondre mais se rendre directement à ladite chambre pour retrouver son amie. Et peut être l'aider à déballer ses affaires. Même si elles se parlaient tous les jours par message. Ce n'était pas pareil. Mia enfila ses chaussures, une dernière vérification puis elle sorti de sa chambre. Se rendant rapidement au bon étage.

Une fois devant la porte de son amie, elle vérifia que c'était bien le bon numéro et toqua. Un sourire étira alors ses lèvres lorsque la porte s'ouvrit devant elle. « Coucouu ! » Sans vraiment attendre Mia enlaça son amie pour la saluer. « Je me suis dit que ce serait plus simple que je vienne directement ! Et puis tu as sûrement besoin d'aide pour ranger tes affaires, non ? »

Alors que la jeunette poursuivait sa visite de son nouveau chez elle, la porte d’entrée vibra : quelqu’un frappait. C’était certainement Mia, mais Ayame ne put s’empêcher de sursauter à l’idée que ce soit un résident voisin qui vienne faire connaissance, à l’improviste. Cela faisait longtemps qu’elle n’avait pas géré ses relations sociales, et se retrouve seule face à un ou une inconnue risquerait de la mettre mal à l’aise. Le cœur battant, elle profita du fait que la porte était dotée d’un petit judas pour coller son œil dessus : c’était bien Mia ! Un sourire sincère s’étira sur ses lèvres tandis qu’elle ouvrait la porte, ravie. Elle entendit un simple « coucou » claironnant puis se fit enlacer par sa meilleure amie. Elle ferma les yeux un instant, profitant de cette étreinte chaleureuse qui lui avait manqué, puis s’effaça pour la laisser entrer dans sa chambre.

La voix de Mia était toujours aussi claire, douce, et rassurante, comme à chaque fois qu’elles se voyaient. Pas que Mia soit un lointain souvenir dans l’esprit d’Ayame, au contraire, mais cet été avait été particulièrement rempli à la maison, ses parents l’ayant couvée bien plus que d’habitude à l’idée de voir leur oiseau s’envoler du nid. Sa mère l’avait emmenée faire du shopping pour refaire sa garde-robe pour la rentrée, car après tout, comme l’avait-elle dit : « à l’université il faut faire bonne impression, plus personne ne porte d’uniforme et tu peux enfin t’exprimer ». Ayame avait essayé de la convaincre que ses fringues actuelles lui convenaient mais elle s’était laissée prendre au jeu de sa mère pour lui faire plaisir, et avoir un moment à elles deux. De ce fait, Ayame n’avait pas eu beaucoup d’occasion de croiser Mia et leur seul contact avait été via LINE. Elle était donc contente de réentendre sa voix douce.

Aux questions de Mia, Ayame hocha la tête deux fois en guise de réponse. Après tout, sa voix n’était toujours pas revenue, à son grand dam. Ca avait quelque chose de frustrant parfois. Elle savait que ça reviendrait un jour, qu’elle ne pourrait pas éternellement rester enfermée dans son mutisme et ses cauchemars, mais ce n’était pas aujourd’hui.
Ayame détourna donc le regard de son amie un instant et se dirigea vers sa valise encore fermée et verrouillée d’un cadenas. « On ne sait jamais que tu rencontres une personne mal intentionnée dans le train ! Ah, j’aurais tant aimé t’accompagner, mais pourquoi choisis-tu de t’installer pendant mes heures de travail ? ». Les paroles de sa mère résonnaient encore dans sa tête et elle sourit en y repensant. Elle l’avait fait exprès pour avoir son moment à elle, sans personne pour la guide. Elle voulait prendre le train seule, même si cela avait été difficile. Heureusement, entre 13 et 14h, les gens étaient au travail et les rames étaient plus vides qu’à l’ordinaire.

La jeune fille souleva la valise et la déposa sans retenue sur le lit, avant de la déverrouiller et de l’ouvrir en grand face à son amie. Elle savait très bien que Mia allait réagir face à l’immensité de vêtements qui se trouvait ici, alors qu’Aya’ avait l’habitude de s’habiller simplement. Mais elle verrait vite qu’en dehors des habits, la demoiselle n’avait pas ramené grand-chose pour le moment …

Ma mère a un peu abusé sur le shopping je crois ><

Elle avait rapidement pianoté ce message sur son téléphone avant de le tendra à Mia, le sourire aux lèvres.

Mia était contente de retrouver son amie. Même si ça ne faisait pas si longtemps que ça, quand on y réfléchit. Mais déjà trop pour elles. Même si ça ne les empêchait pas de s'écrire tous les jour, sans exception. Leur amitié était importante, et le fait que Ayame ait été déscolarisée n'a en rien déranger Mia, c'était un peu embêtant mais elle allait la voir tout de même. Peut être même qu'elle était la seule. Enfin, cette année Ayame venait à l'université et c'était beaucoup trop chouette. D'avoir le message de son amie, Mia n'a pas attendu de savoir si elle pouvait venir tout de suite ou pas, elle s'est contenté d'y aller. Ayame ne pouvait pas refuser une visite de sa part de toute façon, si ? Non.

Une fois la porte ouverte la jeune femme n'attendit pas d'autorisation pour enlacer son amie. Elle était vraiment ravie de la voir, et puis Ayame avait l'air d'aller bien et ça faisait plaisir.  Mia entra ensuite dans la chambre de sa camarade. Chambre qui ressemblait beaucoup à la sienne , peut être pas dans le même sens, mais tout y était. Elle chercha alors les affaires D'aya du regad. C'est alors que cette dernière se dirigea vers une énorme valise. Mia la regarda jeté cette valise sur le lit sans ménagement. Woah.

Elle rit un peu. « Ah oui ! » Elle posa alors le regard sur le téléphone que lui tendait son amie avant de rire à nouveau. « En effet, elle a dut s'éclater ! Mais ça a du lui faire tellement plaisir ! » Un souorire avat de se diriger vers l'armoire qui était à leur disposition, elle observa l'espace avant de regarder la valise à nouveau. « Il va falloir être organisée très chère ! » Oh elles allaient y arriver c'est sur. A deux en plus.

Mia aida donc son amie a trier ses affaires. Elle lui observait chaque vêtement qui passait. Toujours curieuse de savoir ce que pouvait porter Ayame. Elle adorait leur session défilé d'après shopping. Souvent c'était du shopping en ligne et les essayage une fois le colis reçu se révélait parfois assez marrants. Il arrivait que certains habits n'aillent pas, mais alors pas du tout. Mia bloqua alors en voyant un tissus tout doux, elle déplia le vêtement et observa la robe qui s'offrait sous ses yeux. « Mais elle est magnifique celle là ! Je veux absolument te voir dedans ! » Elle s'approcha alors d'Ayame pour placer la robe devant elle, pour essayer de l'imaginer avec, le sourire toujours aux lèvres. « Tu l'as déjà mise ? » Et voilà. On avait perdu Mia. Elle était capable de déplier chaque vêtements qu'elle ne connaissait pour le regarder mieux. Bien sur elle repliait tout comme il faut après, elle n'allait pas laisser son amie dans le bazar, tout de même.

La présence d’une meilleure amie dans sa vie était toujours un moment-clef pour quiconque. Ayame n’échappait pas à la règle, et voir la sienne dans son petit chez elle lui réchauffait le cœur. S’il y avait une personne dans ce monde sur qui elle pouvait aveuglément compter, c’était bien Mia. Elle était même allée jusqu’à lui apprendre à cuisiner français ! Enfin, juste de la ratatouille, faut pas abuser non plus. Couper des légumes en dés et les faire mijoter était encore dans les cordes d’Aya. Plus complexe, et vous vous risquiez à manger quelque chose de brûlé ou au contraire d’encore cru.

La mission du jour était de vider et ranger le contenu de la valise de la jeune Sakurai. Ayame acquiesça aux commentaires de son amie face à tout ce joyeux bazar. Oui, sa mère avait été ravie de faire cette séance shopping avec sa fille unique. Cela s’était lu dans ses yeux tout au long de leur escapade. Après tout, c’était rare que la demoiselle accepte de sortir avec sa mère pour ce genre de choses, car elles n’avaient pas tout à fait les mêmes goûts vestimentaires : sa mère très traditionnelle, et la fille plutôt moderne, pas toujours 100% féminine non plus. Beaucoup de jeans délavés, de jupes à motifs écossais donnant un style rock’n’roll, des chemisiers plus larges que sa taille … Mais sa mère avait fait un effort et avait accepté que sa fille lui montre ce qui lui plaisait réellement. Mais une chose était sûre, Mia avait raison : il faudrait être organisée. Et rigoureuse aussi, sinon cela finirait comme leurs nombreuses séances d’unboxing après avoir fait des achats en ligne : en franche rigolade et gros bazar au sol !

Les deux amies entreprirent de sortir un à un les vêtements, et Ayame remarqua que la petite manie de Mia d’observer chaque vêtement sous chacune de ses coutures n’avait pas disparu. C’était comme si elle analysait le tissu, la couleur, la matière, l’aspect … Puis elle s’arrêta net. Aya’ n’eut même pas besoin de taper « Tu as fait une trouvaille ? » sur son téléphone que la brunette brandissait déjà une robe au tissu doux et léger. Ayame sourit : c’était le compromis avec sa mère. D’ordinaire, elle ne portait pas souvent de robes, préférant plutôt les jupes ou les pantalons. Mais ça tenait au cœur de Mme Sakurai d’offrir une robe féminine à sa fille alors elle avait accepté, à condition de choisir ensemble la coupe et la couleur idéales. Une jolie robe noire à pois blancs, longue, avec des manches. Des détails importants pour Ayame qui évitait de montrer des parties de son corps depuis l’incident, notamment les épaules.

Mia plaça la robe devant son amie pour voir l’effet donné. A sa question, elle hocha négativement la tête, puis s’empressa de taper sur son téléphone :

Je l’ai seulement essayée à la boutique.

D’un seul regard, Aya’ comprit qu’il était temps pour elle de procéder à une séance d’essayage. Elle sourit de façon espiègle, puis fit un passage express dans la salle de bains pour se changer. Même si Mia était sa meilleure amie, Ayame avait toujours été très pudique, surtout depuis l’incident.
Elle revint quelques instants plus tard, ladite robe sur elle. En mode princesse, elle tourna plusieurs fois sur elle-même, faisant virevolter le tissu, et une fois statique, elle pencha la tête sur le côté, affichant un air innocent, l’air de dire « Alors, verdict ? ». Parfois Ayame n’avait pas besoin d’écrire pour que Mia comprenne.

S'il y avait une chose que Mia adorait encore plus que passer du temps avec sa meilleure amie, c'était leur séance d'essayage d'habits qui pouvait durer, sans mentir, des heures. Mia se souvient encore le jour où elle avait décidé de faire du tri dans son armoire, elles y avaient du temps déjà parce qu'il y avait beaucoup de choses mais aussi et surtout parce qu'elles essayaient tout et n'importe quoi. Elle avait même donner quelques habits à Ayame, ceux qui lui plaisaient vraiment. Mia n'était pas du genre à dépenser bêtement son argent mais quand il s'agissait de faire du shopping elle pouvait ne plus se contrôler heureusement que Aya était là d'ailleurs. Elle n'achetait pas forcément des habits chers, mais ... elle en achetait beaucoup. Alors être là, pour trier et ranger les habits de son amie ravissait Mia au plus au point. Elle prenait le temps de regarder chaque vêtement qu'elle sortait de la valise, la couleur, le tissu, la forme, tout était important. Mia n'avait aucunement la prétention de s'y connaître en fringues mais, elle aimait vraiment ça. C'était sa petite passion secrète connue de Ayame seulement.

C'est alors après quelques vêtements qu'elle tomba sur une robe. Ce qui l'étonna parce que ce n'était pas le genre de son amie, mais comme elle lui avait dit avoir fait du shopping avec sa mère Mia se doutait bien qu'elle avait du faire quelques concessions, comme cette jolie robe.  Elle s'empressa de la placer devant Ayame et de lui demander si elle l'avait déjà mise Elle se doutait que non. Cette robe sentait le neuf, même si elle avait été lavée. L'étudiante posa le regard sur le téléphone ou Ayame lui disait qu'elle l'avait juste essayé en boutique. Bien évidemment elle n'eut pas besoin de dire quoique ce soit que son amie comprit. Un soourire satisfait étira ses lèvres alors que Ayame prit la robe pour aller l'essayer. Il y avait toujours une certaines pudeur entre elles, ce n'est pas Mia que ça va déranger. Elle le comprend parfaitement. Elle attend alors sagement en continuant de trier deux ou trois vêtement, les repliant avec soin après les avoir regarder.

Et quand Ayame apparu à nouveau dans son champ de vision Mia arrêta toute activité pour pouvoir observer son amie sous toute les couture. Un sourire toujours collé aux lèvres. Elle regarda son amie tourner sur elle même. « Mais tu es magnifique ! » Elle s'approcha un peu d'elle. « Elle te va vraiment bien ! J'imagine que c'est ta mère qui t'a un peu forcé la main, mais cette robe.. ça reste quand même toi ! » Elle lui sourit franchement. Elle savit que c'était compliqué pour Ayame de s'habiller de façon plus féminine. Elle ne pouvait que le comprendre, leur traumatisme était un peu commun, même si Mia arrivait un peu mieux à le gérer, et puis elle savait que avec Takeo dans les parage il ne pouvait plus rien lui arriver.  Même si bon..parfois il en faisait trop.

Ayame se sentait un peu gauche dans cette robe plutôt coquette et élégante. Elle qui prônait plutôt les habits confortables et peu révélateurs, elle ne savait pas quelle posture adopter pour se mettre en valeur dans sa nouvelle tenue, alors que Mia faisait ça très naturellement. Elle avait toujours eu beaucoup de grâce dans sa démarche, beaucoup de douceur. C’était entre autres ce qui apaisait Ayame quannd son amie était là. Elle était comme un baume au cœur et quel que soit le malheur vécu dans la journée, un moment échangé avec Mia venait l’éclairer aussitôt. Les deux amies ne s’étaient jamais disputées, même une dispute de copines pour des broutilles. Peut-être que l’absence de voix d’Aya aidait, car avant de se retrouver muette, Ayame n’avait jamais vraiment eu la langue dans sa poche, n’hésitant pas à exprimer fermement ses opinions. Un sacré comble quoi. Et ce n’était pas par message interposé qu’on pouvait être aussi convainquant qu’avec un ton bien placé dans la voix. De plus, l’incident avait rendu la jeune fille plus timide et moins téméraire, elle évitait soigneusement d’attirer l’attention sur elle et si elle avait eu un pouvoir magique, elle aurait souhaité savoir se rendre invisible.

Malgré sa gêne, le regard illuminé de Mia en la voyant dans la robe suffit à détendre la jeune femme et à la faire sourire. Faire plaisir à son amie était toujours un moment de satisfaction pour elle, qui avait parfois l’impression de se sentir inutile. Ce ne devait pas être simple d’avoir une amie qui ne parlait jamais, ne sortait jamais, et était aussi timide, alors que Mia semblait si enjouée et prête à croquer la vie. Elles partageaient le même traumatisme mais ne l’avaient pas appréhendé de la même façon. Mia avait réussi à surpasser certains de ses démons et Ayame était toujours admirative face à sa pugnacité. C’était un peu son modèle, en mode « si Mia l’a fait, c’est signe que moi aussi je peux y arriver ». Mais, comme disait le proverbe, chaque chose en son temps. On verrait où elle serait après la rentrée des classes, si elle abandonnerait ou persévèrerait.

Afin d’enfin répondre à Mia, Ayame récupéra son téléphone laissé sur le lit avant la séance d’essayage, et tapa rapidement un message (elle était devenue une vraie dactylo !) :

Je suis contente qu’elle te plaise. Elle voulait que je prenne une robe, mais elle me proposait des trucs trop colorés et fleuris, celle-ci était le compromis parfait : pas trop révélatrice mais élégante, et surtout, noire ! Je t’emmènerai dans cette boutique, y a plein de belles pièces !

Ayame tendit le téléphone à son amie puis elle esquissa un mouvement pour retourner se changer. Ce serait bien dommage de la froisser pour rien ! Il fallait qu’elle la garde pour une occasion spéciale. La rentrée ? Autre chose ? Elle n’en savait rien, mais elle était certaine qu’un jean serait bien plus confortable pour continuer le tri de la valise.
Elle revint donc une fois changée, et tandis qu’elles continuaient le rangement, Ayame eut une idée : elle se saisit à nouveau de son smartphone et rédigea rapidement un message à l’adresse de Mia :

Quand on aura fini, ça te dit d’aller explorer un peu le quartier ? Il paraît qu’il y a deux rivières qui traversent Tama ! Et les cerisiers de la colline doivent être en fleurs, ça doit être magnifique !

Ayame n’oserait pas encore se promener seule, peut-être plus tard, quand elle aurait pris ses marques. Mais avec Mia, ce n’était pas un souci. Et les deux amies aimaient beaucoup la nature, c’était l’occasion. Un 27 mars, les cerisiers étaient à leur apogée, le froid de cet hiver avait ralenti la chute des fleurs. C’était le moment idéal pour sortir les voir et faire des tas de photos avec son bel appareil.

Mia savait qu'il y avait pleins de choses qui étaient encore compliquées pour son amie, comme porter une robe qui faisait féminine. Mais elle avait fait l'effort pour faie plaisir à sa mère, tout en respectant son style. Elles avaient vraiment trouver un bon compromis et Mia le lui dit sans attendre. Elle se doutait bien que Ayame n'aurait pas choisit cette robe d'elle même. Mais malgré tout, elle lui correspondait bien. Son amie n'était pas encore tout à fait à l'aise avec ça et ça se voyait, alors Mia fit en sorte de la réconforter, de lui redonner confiance. Et elle lui fera mettre, c'est sûr. Elle savait que Ayame avait du mal, mais il lui arrivait parfois, voire souvent, de la motiver, à sortir un peu, aller se promener, aller faire les boutique, acheter tel ou tel vêtement. Même si jamais elle ne forçait sa meilleure amie, elle faisait tout de même en sorte de la convaincre, tout en respectant ses valeurs, sa bulle d'intimité, et de timidité. Elle même avait encore beaucoup à travailler, même si elle ne vivait pas leur traumatisme commun de la même façon, Mia avait aussi des périodes très sombres, où rien n'allait, où elle n'arrivait pas à sortir de chez elle, et en général, si Takeo n'était pas passé par là, c'était Ayame ou Lucas qui arrivait à la convaincre et qui lui redonnait le sourire.

Mia lu le message que lui tendait son amie, un léger rire franchit la barrière de ses lèvres. Elle hocha la tête ensuite. « Oh oui, j'irai avec plaisir ! »Mia était toujours partante pour découvrir de nouvelles boutiques de vêtements. Pour ça il n'était jamais compliqué de la motiver. C'était même souvent les sessions shopping qui la sortait de sa déprime passagère. Quand elle y pensait elle ne savait pas dans quoi elle se serait réfugiée s'il n'y avai pas le shopping, et ses amis, son frère Reina. Elle était vraiment bien entourée et elle se considérait comme chanceuse. Et elle avait inclus Ayame à son cercle, elle savait que si elle appelait Takeo parce qu'il fallait chercher Ayame quelque part, il viendrait sans hésiter. Parce qu'il savait à quel point elle était importante pour Mia. Ces deux là s'était vraiment bien trouvées.

Une fois que Ayame était revenu, changée, elles se remirent au travail pour terminer de trier les vêtements de la demoiselle. Elle en avait vraiment pas mal.  Mais ce n'est pas ce qui arrêterait Mia, au contraire. L'étudiante releva les yeux vers le téléphone qui était tendu vers elle. Elle sourit et hocha à nouveau la tête. « Oh oui bonne idée ! J'ai hâte de voir le coin, il faut qu'on se trouve un endroit de refuge ! » Un QG en quelque sorte, un endroit où elle iraient si ça n'allait pas, en dehors de leur chambre. Un endroit qui les apaiseraient, peu importe la saison. Mia termina alorsde plier les quelques vêtements qu'il restait avant de se tourner vers Ayame. « Et je crois qu'on a terminé ! Quelle équipe de choc ! » Elle sourit, encore,. « On va se balader alors ? En plus je crois que c'est l'heure du goûter ! » Oui, Mia était encore une enfant sur certains points.

Quand les deux filles « parlaient » shopping, on ne les arrêtait plus. C’était vraiment un de leurs moments préférés. Si elle avait quelque peu redouté cet essayage de robe, Mia avait su rassurer Ayame quant au fait qu’elle lui allait à ravir et finalement, elle se prit à penser qu’elle la porterait peut-être de temps à autre. Pour la rentrée sans doute, ou alors était-ce trop élégant ? Elle n’en savait rien. Toujours est-il que les deux amies s’étaient remises à leur dur labeur que de ranger les vêtements d’Ayame. Petit à petit, l’étagère de la chambre 303 se remplissait de façon ordonnée : les pulls avec les pulls, les jupes ensemble, les robes pendues aux cintres, les jeans … Ayame savait pertinemment que cet ordre ne serait pas de longue durée : dans ses moments de paresse, elle avait tendance à juste jeter ses vêtements sur sa chaise de bureau et à les laisser traîner.

Mia avait été très enthousiaste à l’idée de partir en vadrouille dans Seiseki afin de découvrir leur nouveau chez elles. Comme elle le disait si bien, il fallait qu’elles se dénichent un refuge, un QG. Cela serait très certainement la fameuse colline aux cerisiers surplombant la ville, dont Ayame avait entendu parler, mais peut-être trouveraient-elles un endroit encore plus privé ? Elle imaginait que tout le monde se rendait sur la colline pour célébrer le Hanami.

Leur besogne étant finie, Mia avait décrété qu’il était temps d’aller s’octroyer cette balade bien méritée, et qu’en plus c’était l’heure du goûter. Un repas sacré et gourmand pour les demoiselles qui ne loupaient pas une occasion d’aller manger une bonne pâtisserie ou une glace, surtout par ces grandes chaleurs.

Le goûter c’est sacré ! Tu veux aller au Starbucks de la gare ou trouver une nouvelle adresse typique d’ici ? Et on commence par quoi ?

De toute façon, comme d’habitude elles allaient improviser sur place en fonction de leurs envies du moment. Avant de sortir, Ayame se brossa un peu les cheveux car, à force de gigoter dans tous les sens pour ranger, ils étaient tous désordonnés. Puis elle vérifia que son sac à main contenait tout ce qui lui serait nécessaire : son portefeuille, sa carte de transports au cas où l’envie leur prendrait d’aller se balader plus loin, son appareil photo et un petit carnet avec un stylo. Ce serait amplement suffisant pour une première escapade.
Mia aussi devait aller récupérer ses affaires dans sa chambre, alors elles se donnèrent rendez-vous une dizaine de minutes plus tard dans le lobby de la résidence.
Ayame étant moins coquette que Mia, elle fut donc en bas plus rapidement que son aînée, et attendit en observant un peu autour d’elle : il y avait un fumoir, des tables avec une télévision et des consoles de jeux vidéo, ainsi qu’un écran qui affichait les colis réceptionnés par le manager pour les étudiants. La résidence était bien organisée, et elle sentait qu’elle allait passer de bons moments ici, bien entourée.
Mia arriva par l’ascenseur et elles étaient fin prêtes à aller explorer la ville.

TERMINE