Le reflet qu'elle renvoyait dans le miroir ne lui plaisait aucunement, mais hélas aucun artifice ne saurait la satisfaire. Aucun artifice, aucun maquillage ne saurait totalement cacher les cernes de ses yeux. Mais observant le reflet elle ne put qu'être ravie que la trace de sa faute soit caché par un pull aux manches longues cachant ses bras et surtout assez large pour cacher sa perte de poids. Mais aujourd'hui elle savait pourtant qu'elle n'avait besoin de ses artifices, aujourd'hui elle voyait Hideki. Depuis combien de temps ne l'avait-elle pas vu ? Trop longtemps. Dire qu'elle ne l'avait pas fait exprès aurait été un mensonge, elle se doutait qu'il avait remarqué, remarquer cette cicatrice. Elle avait vu son regard et pourtant au lieu de l'affronter et assumer son acte elle avait fuit, fuit simplement pour ne pas voir à se justifier. Elle était l'aîné, elle était celle qui ce devait d'être forte pour eux, pour satisfaire leurs parents et pourtant elle avait échoué et avait lâchement voulu fuir cette réalité qu'était la sienne. Vie ratée ? Pour elle oui, mais pour d'autres ce n'était pas le cas. Secouant légèrement la tête elle préféra ne plus y penser le moment d'en parler de nouveau arriverait bien assez tôt, trop à son goût.
Hanae avait donné rendez-vous à son frère au Parc Ichinomiya, elle se sentait bien ici et le temps était encore assez correct pour pouvoir profiter de l'extérieur. Elle avait pris la liberté de prendre une boisson chaude à son frère dans un café, prenant par la même occasion son mocha blanc, une boisson un peu douce. La jeune femme angoissait légèrement se posant mille questions Hideki avait-il parler à quelqu'un de ce qu'il avait vu ? Non sûrement pas tout du moins elle l'espérait. Surtout pas à Juin, elle le savait beaucoup plus sensible et elle avait peur de voir la déception sur son visage. N'est-ce pas ce qu'elle avérait également sur le visage d'Hideki ? Pourra-t-elle le supporter ? Elle n'avait pas le choix.
Son regard se pose sûr une silhouette qui se dirige vers elle, son visage se pare de son masque habituel, un sourire de façade qu'elle a appris à porter depuis des années devant tous. « Bonjour petit frère » dit-elle en allant simplement à sa rencontre et lui tendant sa boisson « Désolée de ne pas avoir pu me libérer avant j'espère que tu ne m'en veux pas trop » banalité affligeante, mais néanmoins sincère et nécessaire « Comment ça va depuis le temps » question qui avait une réelle importance voulant réellement savoir comment se portait le plus jeune préparant ainsi une réponse fausse et tout faite pour que l'inquiétude ne se peigne sur le visage de son frère.
(#) Re: I'm Okay [FT Yamada Hideki] /!\ TW : Mention TS ϟ Dim 14 Nov - 16:29
I'm okay
w/Hanae Parc Ichinomiya 16h
Le mois de septembre avait filé à toute vitesse, et Hideki ne l’avait clairement pas vu passer. Le jeune homme avait profité de ses vacances d’été pour prendre quelques heures supplémentaires à La Poste et pour avancer dans son prochain roman qu’il espérait de tout cœur finir pour la fin de l’année. Au moins le premier jet à présenter à son éditeur. Le jeune homme ne savait pas s’arrêter et prendre du temps pour lui, qu’il jugeait superficiel. En revanche, prendre du temps pour les autres, il essayait toujours de le faire. C’était sans doute pour ça qu’il avait choisi une carrière d’enseignant en parallèle de celle d’écrivain afin de couvrir ses arrières. Mais malgré tout, ces derniers temps, il avait l’impression d’être en décalage avec tout le monde. Il avait également remarqué que son jeune camarade Haneki, qu’il croisait toujours pendant ses tournées de courrier, avait déménagé. Il ne le voyait plus, sans doute avait-il fini pour de bon chez son père à la campagne, qui sait. Et comme en dehors de ce rituel, ils ne se fréquentaient pas plus que cela, ils s’étaient tout bonnement perdus de vue.
En revanche, c’était sa sœur aînée qui avait besoin de lui aujourd’hui. Hanae lui avait donné rendez-vous vers 16h au parc Ichinomiya. Il était de matin aujourd’hui, et n’avait eu qu’un cours en début d’après-midi à Chûô. Il lui avait donc dit qu’il arriverait juste après ce dernier. La rentrée venait à peine de débuter qu’il se sentait déjà débordé. Mais pour sa sœur adorée, il avait toujours du temps. Surtout qu’il savait pertinemment qu’elle allait mal, mais à chaque fois qu’il avait tenté une approche vers elle, elle l’avait fui comme la peste. Pourtant il n’avait pas pu passer à côté de ses blessures et du fait que même par grosses chaleurs, elle n’avait pas découvert ses bras cet été. Cela lui avait glacé le sang de réaliser qu’il était passé à côté du mal-être de Hanae et qu’il n’avait pas été assez présent pour elle, trop concentré dans ses romans et ses études pour voir qu’elle n’allait pas bien. Il se sentait coupable en tant que frère. Alors maintenant qu’elle lui tendait la main et une occasion de se racheter, il n’allait certainement pas la laisser passer pour dire qu’il avait du boulot. Le boulot attendrait.
Hideki sortit du train de la ligne Keio bondée, et se fraya un chemin parmi les passagers qui se ruaient vers les escaliers pour quitter la gare en hâte. Il détestait la foule, mais il s’y était habitué. Une fois dehors, il marcha d’un pas quasiment automatique vers le parc, connaissant le chemin par cœur. Il ne savait pas exactement où l’attendait Hanae alors il garda les yeux rivés sur le paysage, guettant la silhouette de sa sœur aînée. Il finit par l’apercevoir sur la plaine un peu plus loin, et s’approcha d’elle avec son sourire habituel qui pourrait rendre sa bonne humeur à n’importe qui. Il lui rendit son bonjour et accepta avec plaisir la boisson chaude qui apporterait du réconfort à la difficile conversation qui allait s’ensuivre. Lorsqu’elle lui dit qu’elle espérait qu’il ne lui en voulait pas trop pour l’avoir fait tant attendre, il hocha la tête de droite à gauche avant de répondre, sur son ton jovial et rassurant qui le caractérisait tant :
« Comment pourrais-je t’en vouloir ? Parfois il faut du temps pour certaines choses, l’essentiel c’est que tu sois là et qu’on passe du temps ensemble. »
… Et que tu n’aies pas commis l’irréparable … ne put-il s’empêcher de penser, un frisson lui parcourant l’échine rien qu’à l’image de sa sœur disparue à jamais. Mais il se ressaisit rapidement, il était hors de question de se montrer morose alors qu’Hanae comptait sur lui et son oreille attentive pour la soutenir. Il réafficha son immense sourire attachant sur son visage et répondit à la question d’Hanae :
« Ca va ça va ! La routine ! Mon baito, les cours … et puis de temps en temps je prends le temps de respirer pour voir ma sœur adorée ! Et toi ? »
Il savait très bien que la réponse qu’elle lui donnerait serait un mensonge mais la moindre des politesses était de s’enquérir de son état, qu’elle choisisse d’être sincère ou non.
Un fin sourire naît sur les lèvres de l'aîné, il n'avait pas idée à quel point. Mais elle était surtout rassurée que la rancune n'embrume pas les sens de son petit frère, aurait-elle pu le supporter ? Elle n'était pas sûre, même si elle était sincère avec sa personne cela n'aurait été que trop mérité à ses yeux. Elle l'avait fui, lui peut-être plus que Jun, il était celui qui arrivait à lire en elle de manière plus aisée. Mais aujourd'hui elle devait faire face, elle lui devait cela, elle se le devait également à elle. « Tu aurais pu, ce n'étais pas très sympa de ma part de ne pas prendre plus de temps pour toi ou même pour Jun » Elle ne mentionnait pas leurs parents, pas qu'elle ne s'en voulait pas, juste qu'elle avait cette impression de les avoir déçu quand bien même ils n'étaient au courant de rien.
Hanae lui demande de ses nouvelles, son sourire se fait sincèrement heureux de savoir qu'il allait bien, un léger rire quitte la barrière de ses lèvres à ses mots. Parfois elle se demandait comment Hideki arrivait être ainsi, souriant, aussi jovial, parfait on dirait que rien ne pouvait l'atteindre, il avait toujours été cette force sur laquelle elle osait parfois se reposer même s'il n'en était pas conscient. Si Jun était son rayon de soleil, Hideki était sa dose de courage au quotidien. Elle se doutait qu'il devait avoir ses moments, moment où ça n'allait, mais qui était-elle pour le juger de ne pas lui montrer ? Jun et lui étaient réellement les deux personnes les plus précieuses à ses yeux et elle doutait que cela puisse un jour changer.
Comment allait-elle ? Lui mentir, lui dire la vérité, la balle était dans son camp. Elle apporta sa boisson à ses lèvres, pesant le pour et le contre. Un faible soupir, une mèche remis derrière son oreille, Hanae regarde son petit frère avec un petit sourire triste « J'aimerais te dire que ça va, mais je n'ai plus envie de mentir » Aveux que cela fait malheureusement bien trop longtemps qu'elle n'allait pas bien, mais elle laissait enfin tomber le masque. « Tu as dû remarquer par vrai ? » Elle baisse les yeux quelque peu honteux, sa main touchant là où sa cicatrice était bien qu'on ne puisse la voir. « Je suis désolée Hideki, j'ai merdé hein ? » Dit-elle simplement, elle ne pleurait pas elle se l'était promis, elle n'avait pas ce droit. « J'ai le temps d'un instant abandonner » Elle voulait au début évité, retarder le sujet, mais elle ne pouvait plus, cela ne changerait plus rien maintenant. « Mais... Je commence à aller mieux je crois » Elle ne pouvait totalement l'assurer, alors elle avait joué la carte de l'honnêté.
Hanae faisait des efforts pour se comporter de manière naturelle, et Hideki n’avait pas pu rater cela. Il avait cette faculté à savoir lire dans les émotions de son entourage. Il ne comprenait pas toujours tout, mais il cernait généralement l’essentiel. Il savait notamment que le regard éteint et le corps amaigri de sa sœur aînée la trahissaient, même si elle tentait du mieux qu’elle pouvait de sauver les apparences. Mais il ne pouvait pas lui en vouloir pour cela. Lorsqu’on allait mal, on avait tendance à le cacher aux autres pour éviter d’être plaints, d’attirer la pitié, ou de se faire bombarder de questions auxquelles il était difficile de répondre. Hideki ne le savait que trop bien. Mais bon, il était bien la dernière personne qui pourrait juger sa sœur ou lui témoigner de la pitié. Il se sentait davantage coupable de ne pas avoir été là pour elle lorsqu’elle en avait besoin, trop concentré sur ses propres obstacles qui lui paraissaient désormais futiles comparé à ce qu’elle avait enduré.
« Tu avais besoin de temps pour toi. Tu veilles déjà sur nous constamment, tu as le droit de prendre une pause. »
Il avait lâché ça spontanément. Après tout, même si Hanae était plus maternelle que leur propre mère, elle ne devait pas sacrifier sa vie pour ses frères. Il savait pertinemment que même en lui disant de souffler, d’arrêter, elle ne le ferait pas, mais bon, il pouvait toujours essayer. Puisqu’elle lui avait demandé de ses nouvelles, il avait répondu des banalités, ayant toujours eu du mal à parler de lui-même. Il préférait amplement s’intéresser aux histoires et aux vies des autres, qu’il trouvait bien plus intéressantes que la sienne. Et ça permettait de le sortir un peu de la spirale infernale de son quotidien. Mais le sourire sincère qui s’était étiré sur le visage d’Hanae lui fit chaud au cœur.
Lorsqu’il lui retourna la question, Hideki savait qu’il y avait une chance sur deux pour qu’Hanae choisisse de lui mentir. Soit pour le protéger comme elle l’avait toujours fait, soit parce qu’elle n’assumait pas ses actes ou avait besoin de temps avant de les rendre réels aux yeux de sa famille et de son entourage. Dans tous les cas, si elle choisissait cette option, il respecterait cela. Il n’avait jamais vécu ou même effleuré quelque chose de similaire à ce qu’elle avait tenté de faire, alors il n’avait pas son mot à dire sur comment aborder les choses. Pourtant, Hanae choisit la vérité, apparemment lasse de mentir ou de se cacher derrière des prétextes. Il l’écouta avec intérêt sans l’interrompre une seule fois. Oui, il avait remarqué le bandage à son bras, puis sa cicatrice, la maigreur de son corps et de son visage. Il serra les dents et les poings lorsqu’elle admit avoir merdé. Il sentait les tremblements de sa voix et le fait qu’elle se retenait de pleurer. Elle avait voulu abandonner. Mais elle estimait commencer à aller mieux. La lumière au bout du tunnel. L’espoir était donc encore permis. Hideki n’était pas quelqu’un de foncièrement affectif, sinon il l’aurait prise dans ses bras. Mais il avait toujours été plus doué avec les mots qu’avec les effusions affectives. Il laissa donc planer un léger silence, cherchant ses mots, avant de dire :
« Hanae. On s’en fout de tout ça. Tu es là, avec moi, avec nous, et c’est là tout ce qui compte. Je ne m’en voudrai jamais assez de ne pas avoir été suffisamment lucide pour voir que tu n’allais pas bien. J’ai été un frère pitoyable, alors que toi, tu nous a toujours fait passer avant toi et ton bonheur. »
Il marqua une pause, le cœur lourd, avant de reprendre :
« Il est temps que tu te fasses passer avant les autres Hanae. Que tu construises ton bonheur. Jun et moi nous sommes adultes maintenant. C’est à nous de te rendre tout ce que tu nous a donné. Alors je suis très heureux que tu dises que tu penses aller mieux. »
C’était vrai, il espérait de tout cœur qu’elle ne recommencerait pas ses tentatives absurdes. Il voulait qu’elle aille de l’avant, qu’elle se sente apaisée. Il but un peu de la boisson qu’elle lui avait amené, pour se réchauffer à l’extérieur et à l’intérieur. C’était réconfortant.
« C’est peut-être une question délicate, mais qu’est-ce qui a fait que tu aies eu envie … d’abandonner ? »
Hideki était parfois indélicat, mais il préférait souvent aller droit au but que de tourner autour du pot des heures durant. Il pouvait apparaître un peu brut de décoffrage à cause de cela, mais c’était sans doute de famille, Jun étant un peu comme ça aussi. Seule Hanae était plus douce. Il voulait savoir ce qui avait pu traverser son esprit pour comprendre et lui tendre une main pour l’aider