Q : Tu es en quelle année et tu étudies quoi à Chûô ?R : 4 années de licence, il entame sa première année en master de commerce qu'il aura suivi tout au long de son cursus.
Q : Et à côté des études, tu as un baito ?R : Il offre son visage pour la compagnie Nishikado mais ne dispose pas d’un travail régulier.
Q : Quel est l’endroit où on risque le plus souvent de te trouver sur le campus ?R : C’est dans la cour qu’il passe le plus clair de son temps libre.
Q : A Chûô, est-ce que tu participes à des clubs ou des cercles ?R : Amateur de tir à l'arc, Rui a naturellement intégré le club de kyudo. Seule activité que ses 10 doigts servent correctement.
Q : Tu vis à la résidence Seiseki ou par tes propres moyens ? R : Les moyens de papa-maman lui permettent de jouir d’une maison dans le quartier de Sakuragaoka. Si la partie extérieure exhale la modernité, l’intérieur de la demeure instaure une atmosphère morose, accentuée par l’inanité des lieux. En dehors des lieux prédestinés à manger et se faire une nouvelle beauté, il ne dispose presque pas de biens personnels. Se contente d’un simple lit et d’une commode perdue dans l’immensité de la pièce.
Q : Tu te décrirais comment en quelques mots ? R : Démarche assurée, sourire communicatif, Rui inspire témérité et détermination. Jeune homme charmant, de bonnes mœurs et valeurs, il est capable d’instaurer le respect par le charisme évident qu’il dégage. Ses mots s’affirment avec la plus grande hypocrisie pour maintenir une stature équipollente aux fantasmes de son père. Les éclats d’éloges ne sont plus que banalités et les doutes sur sa future ascension à la tête de la compagnie Nishikado sont balayés d’un revers de la main par les actionnaires. Pourtant, chez lui, le doute persiste. Constamment. Cette incertitude est due à ces résidus de confiance qu’il peine à réédifier.
Lorsqu’un sentiment de profonde solitude envahit ses songes et anime ses craintes, il se laisse transporter dans les interdits et intouchables. Tout est bon pour annihiler cet émoi qui l’emprisonne depuis gamin, quitte à découvrir une nouvelle âme à ses côtés au matin ou ignorer à quel point il s’est mis minable la veille pour s’oublier. S’il abhorre la solitude, il apprécie le contact et la chaleur humaine, ce qui fait de lui un être particulièrement sociable. Loin des papotages superfétatoires qui ébranlent son ennui, il se plait dans une désinvolture constante pour alimenter l’ire de ses interlocuteurs. L’affection est un sentiment qu’il ne maîtrise pas. Quand il aime, il aime mal. Se pare de ses plus beaux surnoms et déverse son affect dans une tactilité parfois déconcertante qui lui permet de trouver cette sorte d’équilibre émotionnelle. Côté cœur, c’est un véritable bordel émotionnel. Populaire auprès de la gent féminine, il s’amuse avec la première femme capable de faire palpiter son cœur et se délaisse dès que l’adrénaline s’amenuise. A l’inverse, quand il n'aime pas, il le fait bien et fait montre d’une ironie mordante oscillant à une honnêteté sans faille.
Rui ne dispose pas de domestique et si ses phalanges sont douées d’une technicité sans faille dans son sport de prédilection, elles sont en revanche incapable de préparer un quelconque repas, même le plus simple. Le plus souvent, il s’empare de quelques billets pour déguster des plats déjà préparés dans le konbini le plus proche. Ses pas ne foulent qu'à de rares occasions les restaurants gastronomiques.
Q : Et finalement, dis-nous en un peu plus sur ton parcours jusqu’à aujourd’hui.R : o1. Né d’un adultère entre un père japonais et une mère coréenne, Rui a grandi aux côtés d’un père absent et d’une génitrice totalement inconnue. C’est la femme légitime de son père qui a veillé à une partie de son éducation. Une femme qui prenait déplaisir à élever l’enfant d’un autre. Plus qu’un choix, c’était une obligation qui lui glissait entre les doigts à la suite de longues années chaotiques où la trahison se mêlait aux tensions entre les mariés. Pression familiale, le divorce était inconcevable. Source de honte sur sa famille, sur son mari… Mais plus encore sur elle-même.
o2. Exceller. Frôler la perfection. Se satisfaire des flagorneries, les deux pieds posés sur la marche la plus haute du podium. Être le meilleur n’est pas une option mais une évidence. Là-haut, sur son piédestal, le gamin fait régner sa monarchie au sein du collège. Véritable terreur, il déverse son poison pour endiguer les émotions de frustration et de solitude qui le traversent. Dans la demeure familiale, les âmes qui errent ne partagent pas son nom. Elles s’attèlent à leurs tâches sans se soucier de cet enfant qui perd un peu plus de lueur chaque jour. Alors l’esprit capricieux se découvre l’envie d’être perçu à sa juste valeur. Prouver que son existence est supérieure à celle des autres. De simple terreur, il devient impitoyable et ne manque pas de corriger toutes personnes qui se prendraient à défier son autorité, autant chez lui qu’à l’école.
o3. A sa dernière année de collège, ses parents retrouvent le cocon familial pour quelques jours, dans le but de régler des problèmes internes liés à l’entreprise de son père. A leur arrivée, Rui découvre l’existence d’un nouveau-né, déjà âgé d’une année, peut-être deux. La joie se dépeint sur son visage, s’infiltre dans ses veines pour diffuser une douce chaleur dans son myocarde. Le nouveau minois chasse toute solitude et anime ses yeux de mille étoiles.
Il n’est plus seul. Ne le sera plus jamais.
o4. Lors d'une soirée, son père profite de ses heures de repos pour entreprendre un dîner avec la famille d’un fidèle ami. Le couple, accompagné d’un enfant de l’âge de Rui, se joint à la façade exemplaire de la famille Nishikado. Les compliments s’élancent avec la même hypocrisie que l’échange des regards chaleureux. Repas agréable, les enfants se délaissent de leur siège pour rejoindre la salle de séjour.
Il y a comme un air de déjà-vu sur le visage du jeune convive.
Un Narcisse autocentré qui dégage un air altier envers son hôte.
Les egos s’étendent et s’entendent. Les mots sont aiguisés, capable de trancher la fierté sans l’once d’une culpabilité. Bientôt, les mains se joignent à l’insuffisance des mots. Si les hommes des familles respectives se sont amusés de cette simple bagarre, insistant sur le fait qu’ils sont de jeunes garçons, la mère de Rui s’est désolidarisée de ses actes, la colère luisant ses iris.
Ce gosse, elle l’a toujours méprisé, toujours perçu comme le point noir d’une famille parfaite.
En cette fin de soirée, à l’heure où les convives et son mari ont quitté les lieux, sa patience déserte ses veines. Sa voix fend l’air avec la même consistance qu’une lame quand l’ire de ses paroles s’enfoncent avec rage dans le cœur du gamin. La délicatesse s’est effacée de ses paroles acerbes dans lesquelles elle lui dévoile l’identité de sa mère. Une simple prolétaire dont l’égoïsme l’a poussé à se séparer de ce nouveau-né contre une coquette somme d’argent. Lui, n’est qu’un nuisible. Une erreur de la nature et de son père. Ses mots percutent par la violente tonalité quand les larmes dévalent le visage du garçon. Les précisions sur l’héritage l’assènent du coup fatal. Si ses possessions sont de l’ordre du néant, elle s’assurera qu’à l’avenir, il en soit de même.
o5. Avec le temps, sa beauté s’est affirmée jusqu’à plaire par la douceur de ses traits, le chaleureux de ses gestes et la bienveillance de ses sourires. Ce masque incrusté à sa peau résulte de l’éveil de nouveaux desseins, où il souhaite s’assurer de disposer de l’héritage afin de détruire un à un les piliers de la fondation Nishikado. Une manière pour lui de restaurer son honneur et admirer la déchéance de ses parents, principalement cette femme qui n'a de cesse de poser des obstacles sur son chemin.