Voilà la première chose qui traverse mes lèvres en franchissant la porte de la cafétéria des professeurs. Il n’y a personne d’autres que nous trois et ça tombe bien car c’est justement aux professeurs Enjoji et Koizumi que je voulais parler. « Bonjour à vous deux. Vous auriez une minute ? » Même si la réponse est non, ils vont quand même prendre le temps de m’écouter. Je ne suis pas d’une nature sociable et il me faut une bonne raison pour engager la conversation à un collègue qui n’enseigne pas la même discipline que moi. D’ailleurs, je ne le fais pas de gaité de cœur, j’ai en général autre chose à faire que de papoter avec mes pairs mais ce problème les concerne aussi. Sortant mon téléphone portable, je pianote rapidement dessus avant de leur montrer l’écran. « Lequel de vous deux est responsable de cette mauvaise blague ? » Qu’affiche mon écran ? Un document photographié au secrétariat un peu plus tôt qui nous porte tous les trois volontaires pour organiser une sortie cohésion de fin d’année pour les professeurs de Chuo. « Regardez-vous email, une note vient de passer à ce sujet et nos collègues nous ont déjà envoyé des mails pour s’inscrire à cette fameuse sortie. Alors ? A qui dois-je dire merci pour avoir été choisi comme volontaire désigné ? » Parce que bien sûr il n’y a pas de sceau ni d’autres signature que nos noms à tous les trois sur la fameuse lettre reçu au secrétariat. D’ailleurs personne n’a eu le réflexe de vérifier qu’elle venait bien de nous avant de la diffuser. Comme si j’avais que ça à faire d’organiser des sorties cohésions avec mes collègues !
Ces mots qui auraient pu résonner comme une douce mélodie aux oreilles de Koizumi Yûji eurent pour simple effet de l’agresser verbalement pendant sa précieuse pause repas. Il était si ravi qu’il y ait peu de monde dans cette cafétéria, cette interpellation venait de briser son répit. Haussant un sourcil, l’enseignant releva la tête avec nonchalance, se demandant qui était le second concerné. Enjoji Keito. Il l’avait déjà croisé quelques fois dans la salle des professeurs et il avait été présent à l’inauguration du bâtiment des arts tout neuf dont lui et ses pairs avaient hérité pour enseigner leurs arts respectifs. Quant au fauteur de troubles, il s’agissait de Kawamura Renji, également professeur d’arts. Yûji aurait été incapable de dire dans quelle matière il enseignait, tellement cela lui faisait une belle jambe. Ce dernier se décida d’ailleurs à les saluer comme il se devait, après les avoir hélé de manière sommaire. Bon, il allait accoucher ?
« Bonjour. On a le choix ? »
Enjoji, Koizumi et Kawamura étaient le trio des professeurs taciturnes, discrets et qui ne parlaient à personne et se contentaient de faire leur travail. Les rumeurs concernant une possible relation amoureuse entre Hoshino Mitsue et lui-même s’étant doucement dissipées, le jeune professeur de théâtre évitait au maximum d’attirer l’attention sur lui. Mais les deux autres étaient comme lui. Enjoji et lui se contentaient de partager la table de la cafétéria mais ne s’étaient pas adressé la parole pour autant.
Kawamura braqua soudainement vers eux un écran de téléphone présentant une photo du secrétariat. Yûji ne comprit pas immédiatement de quoi il s’agissait : il plissa les yeux avant de les écarquiller de surprise en comprenant le problème. Eux, organisateurs d’une soirée de cohésion de fin d’année ? Quelle bonne blague.
« Qu’est-ce que c’est que ça encore ? »
Une farce d’Halloween qui sortait de derrière les fagots avec quasiment 10 jours de retard ? Lee Sora qui voulait l’emmerder une fois de plus ? Après tout, cette garce en avait après tout le monde quand il s’agissait d’enquiquiner les gens, alors pourquoi pas. Yûji grimaça et même s’il n’avait pas adressé un seul regard à Enjoji, il se doutait qu’il devait afficher une expression similaire à la sienne. Lorsque Kawamura suggéra de consulter leurs emails pour vérifier ladite note et les emails de collègues, Yûji s’exécuta. Il n’était pas très téléphone et il l’avait laissé au fond de la poche de son manteau pendant son repas. Effectivement, des mails avaient fusé. Putain.
« C’est impossible. C’est une farce d’Halloween en retard ou un collègue qui veut se payer notre tête. En plus il n’y a pas de sceau, ça n’a rien d’officiel. Qui a bien pu faire tourner cette bêtise ? Une idée, Enjoji ? »
Animer une soirée cohésion entre enseignants était vraiment le dernier de ses soucis et il était typiquement le genre de personne à ne jamais assister à ce genre de soirée, alors pourquoi l’organiserait-il ?
Les émotions sont le moteur de l'art, sans elles vos œuvres ne valent pas mieux qu'une coquille vide
Il est malentendant • Il est professeur de dessin • C'est un ancien chanteur • Il est passionner par l'art en général • Il sait parler français & anglais • Il adore le piano
(#) Re: Volontaires désignés - Renji feat Keito et Yûji ϟ Lun 8 Nov - 20:16
Il ne peut que regretter d'avoir laissé ouvert son appareil auditif lorsqu'il pénètre la cafétéria. Une agression dont il se serait grandement passé alors qu'il n'aspirait qu'à un simple moment de paix. Fort heureusement, le son est faible, mais pas assez pour feindre l'ignorance au vu de son regard tourné vers l'importun après avoir également observé le deuxième homme alpagué. « Je doute que refuser soit une réponse satisfaisante » Ce n'était pas une question, c'était plus une affirmation. Kawamura Renji, le professeur qui avait quémandé leur attention le temps d'un instant, Koizumi Yûji deuxième victime de l'importun. Keito aurait pu l'ignorer purement et simplement en éteignant son appareil, mais cela avait l'air d'être quelque chose d'assez important pour vouloir entamer la conversation avec deux personnes avec qui on échangeait que lorsque cela était nécessaire.
Le regard braqué sur l'écran de téléphone, le professeur de dessin ne cache aucunement son regard agacer. Une vaste blague, il n'avait clairement pas signé pour ça, ou peut-être est-ce les petites lignes qu'il n'avait pas prises la peine de lire ? Son propre téléphone en main, il imite son collègue et observe lui aussi ses mails comme l'a suggéré Kawamura. Un soupir franchit les lèvres de Keito avant de prendre la parole à son tour pour commenter cette mascarade. « Aucun de nous n'est responsable de ça de toute évidence » Au vu que leur caractère respectif aucun d'eux n'aurait eux la brillante idée de les inscrire pour organiser cette sortie. Keito aimait dessiner et enseigner, il commençait doucement à y prendre goût, mais de là à faire ce genre de truc très peu pour lui.
Relisant le mail, Keito écoutait ses collègues tout en essayant de comprendre le comment et surtout du pourquoi ? « Une blague de collègues ce croyant drôle et fin ? » Les possibilités étaient multiples et toute les voie ne lui plaisaient guère bien au contraire. Lui ordinaire avare de mots n'avait de choix que de communiqué avec ses collègues pour tirer cette histoire au clair « On ne peut pas simplement passé notre tour et refilé ça à d'autres, je pense que l'on sera d'accord avec le fait que nous sommes les derniers à qui demander cela au risque d'une soirée désastreuse ? » Il n'avait pas de doute que s'il le souhaitait cela serait grandiose or ce n'était aucunement le cas aucun d'eux ne souhaitait cela « On peut toujours aller voir la direction et annuler cette bêtise ? » Il se passe une main dans les cheveux, sa sociabilisation était réellement à refaire. « Ceux qui désirent réellement y aller ne peuvent pas simplement l'organiser eux même ? » Il ne voulait pas organiser quelque chose auquel il n'avait en aucun cas envie d'y participer.
Bon si j’en juge à leur réaction, ni l’un ni l’autre n’est responsable de la situation dans laquelle nous nous trouvons. D’un autre côté, je m’en doutais. Bien qu’ils soient mes cadets d’une bonne dizaine d’année, ils n’ont pas l’air du genre à se prêter à une blague d’un si mauvais goût. D’ailleurs ils n’ont pas l’air ravi d’être impliqué dans cette mascarade, ce que je peux comprendre puisque c’est également mon cas. Malheureusement maintenant que le coup est parti, je ne vois pas comment on pourrait faire autrement. « Parce que vous pensez que maintenant que le coup est parti, ils vont nous laisser nous défiler comme ça ? Je vous en prie, je vous laisse expliquer la situation à nos chers collègues qui sont déjà tous surexcités à la perspective d’une telle sauterie. » Mon ton est un peu acide, pourtant je ne devrais pas m’en prendre à eux. Ils ne sont pas responsables de la situation et nous sommes tous les trois victimes d’un petit farceur qui a cru que ça serait amusant de faire collaborer nos trois personnalités pour une évènement qui n’est clairement pas notre tasse de thé. « J’ai cru comprendre que le doyen était enchanté qu’on s’investisse autant pour la bonne entente de la communauté éducative. » Alors autant dire qu’on ne va pas pouvoir se défiler facilement, à moins de vouloir devenir la risée des professeurs de Chuo. « Si ça se trouve, notre petit plaisantin n’attend que ça, pouvoir nous pointer du doigt. » Et je ne compte pas me laisser faire même si ça veut dire devoir passer du temps avec ces deux là durant les prochains jours. Mais je crois que ça se voit à mon visage que j’en suis enchanté. La preuve, je ne souris pas et ça me gave littéralement.
Non mais sérieusement, c’était une vaste blague. Surtout que Yûji ne comptait pas faire de vieux os à Chûô, maintenant qu’il avait réussi à lancer sa carrière d’acteur. Il ne voulait pas vendre la peau de l’ours avant de l’avoir tuée, mais si à la fin du tournage du drama, on lui faisait d’autres propositions, bye l’école. Pas qu’il n’aime pas les lieux et ses étudiants, mais sa vocation n’avait jamais été à l’enseignement, ni à la pédagogie en général. De ce fait, se retrouver à organiser une soirée de cohésion avec ses collègues ne l’enchantait absolument pas. Faire copain copain avec ceux qu’il quitterait incessamment sous peu, aucun intérêt.
Enjoji était aussi sceptique que lui. Comme il l’avait souligné, refuser la minute d’attention requise par Kawamura n’était pas une option. Il avait ajouté qu’aucun d’entre eux ne semblait responsable de cette situation saugrenue. Son collègue semblait soutenir l’hypothèse d’une farce d’un collègue. Il émit l’idée de passer leur tour et de demander à se faire remplacer par des personnes bien plus compétentes qu’eux pour ce genre d’activités. Yûji acquiesça d’un hochement de tête : Enjoji avait raison, ils étaient les derniers bien placés pour organiser ce genre de soirée, au risque que ce soit morne, ennuyeux et particulièrement silencieux. En effet, c’étaient sans doute les trois professeurs les plus avares de mots et taciturnes de tout le bâtiment des arts. Le professeur de …. Yûji ne savait même pas de quelle matière, suggéra d’aller à la rencontre la direction pour faire annuler le projet ou de convaincre les motivés d’organiser eux-mêmes leur soirée. Yûji allait répliquer mais ce fut Kawamura qui prit la parole en premier. Selon lui, impossible de faire marche arrière maintenant que le mal était fait. Mais il n’avait pas tort : l’événement était lancé, les participants annoncés, et eux, au milieu, comme un cheveu sur la soupe. Quelle partie de plaisir.
Kawamura en rajouta une couche en les informant que le doyen semblait enchanté à l’idée d’un investissement de la part du trio des tombes humaines. Ah bah merde, c’était bien leur veine ça. Yûji soupira de dépit. Et selon lui, le responsable devait être ravi de sa connerie. Yûji commença sérieusement à se demander si ça ne pouvait pas être Lee Sora : cette peste lui avait foutu la paix depuis la dernière fois avec les rumeurs le concernant lui et Mitsue, mais elle était capable de tout. Même au sein des professeurs, elle avait la réputation d’être une véritable chipie qui mettait la zizanie partout où elle passait.
« Vos informations n’apportent vraiment aucune perspective positive, Kawamura. Je me demande si Lee Sora ne saurait pas quelque chose à ce sujet. »
Et puis, si ce n’était pas elle la coupable, avec ses oreilles qui traînaient partout, elle saurait certainement qui aurait pu commettre une telle fantaisie.
« Il va bien falloir trouver une solution. Visiblement, aucun de nous ne saute de joie. »
Yûji n’avait ni le temps, ni l’envie d’organiser cette fameuse soirée. Il n’aimait pas la compagnie des gens, les moments sociables, les discussions sans profondeur et abreuvées d’alcool. Rien que d’y penser, il avait une furieuse envie de bailler.