Les scènes ouvertes sont toujours l’occasion de découvrir de nouveaux musiciens, talentueux ou non, je ne suis pas là pour les juger mais pour écouter de nouvelles mélodies et observer de nouvelles techniques plus ou moins bonnes. Même des amateurs ou des semi-pro peuvent m’apprendre des choses ou me surprendre. Après tout, la musique n’est pas une science exacte et lorsque je n’ai pas la casquette de professeur, je me montre beaucoup plus curieux et intéressé par la nouveauté. Je suis moins prompte au jugement et puis il faut bien que je prenne moi aussi du bon temps. J’ai d’ailleurs accepté de monter sur scène pour un groupe d’amis dont le bassiste leur avait fait faux bond. Je n’ai pas cherché à en savoir plus. Le job était dans mes cordes et puis j’ai passé un bon moment. Au point d’accepter un after avec d’autres musiciens.
Il n’y a presque que des hommes à notre table et je suis assis en face d’un inconnu dont le visage m’est pourtant familier. Peut-être l’ai-je aperçu plus tôt dans la journée sur scène ? Je ne sais plus vraiment. Il y avait tellement de groupe, de musiciens, de chanteur… et puis si ça se trouve je l’ai juste croisé ailleurs.
Je ne suis pas d’une nature bavarde, ni curieuse. A l’université, j’ai mauvaise réputation. Je suis l’homme des glaces. Ce professeur redouté par ses étudiants car trop sévère. Je ne suis pas non plus très sociable bien que je me montre toujours poli avec mes pairs. Dans la vie privée, c’est un peu différent, surtout lorsque je suis avec des amis. L’un d’eux est à ma droite mais puisqu’il semble lancé dans une passionnante conversation, je reporte toute mon attention sur le jeune homme qui me fait face. Après un instant, je lui demande : « Vous avez joué vous aussi aujourd’hui, n’est-ce pas ? » Je ne sais plus très bien qui l’a invité à notre table. Il y a de toute façon pas mal de visage inconnu avec nous. Il n’est pas le seul que je ne connais pas mais je sais au moins une chose, nous sommes tous les deux musiciens et c’est un point commun non négligeable.