Ma journée me parait totalement interminable. Après avoir terminé les cours j’ai fait demander les clés d’une salle de musique et j’ai passé toute ma soirée à faire une composition qu’une amie m’a demandé. J’aime bien composer à la faculté car je peux m’enfermer dans une salle de musique avec mon ordinateur, ma guitare et je peux toujours vérifier sur les instruments si c’est bien en accord avec ce que je veux. Je me débrouille très bien en guitare mais j’ai des notions assez avancées sur les autres instruments qui me permettent de composer de nombreuses chansons de tout genre.

Je ne vois pas le temps passer, voulant rendre parfait ce que je dois faire. Je suis déjà du genre perfectionniste mais je le suis encore plus envers moi quand je fais un travail pour une autre personne. Il est déjà très tard quand je rends les clés de la salle et il m’arrive parfois de bailler un peu. Je finis par regarder l’heure sur mon téléphone et je me rends compte que je vais vraiment être trop juste pour avoir le dernier train pour rentrer chez moi. Je soupire, il va falloir que je paie le taxi pour rentrer chez moi. Hors de question que je rentre à pieds, en pleine nuit, avec mon sac de cours et ma guitare sur le dos.

Une fois que je sors de l’enceinte de l’université, je suis saisi par le froid et je sers la veste que j’ai mis par-dessus ma robe. Il va falloir que je pense à mettre des ensembles et des collants plus chauds maintenant. Malgré tout je prends le temps de fouiller dans mon sac pour en sortir un paquet de cigarettes et j’en allume une. Qu’est ce que ça fait du bien. Mon ventre commence à se rappeler à moi dans le même temps. Il faut dire que je n’ai rien mangé depuis le repas de midi et je commence à avoir vraiment faim. Et si je fais à manger chez moi je vais réveiller mon frère et c’est tout sauf une bonne idée.  

Une fois ma cigarette terminée, je l’éteins et je la jette à l’endroit prévu pour. Je me dirige tout droit vers une des épiceries ouvertes H24. Je salue le caissier quand j’entre à l’intérieur et je commence à fouiller ce que je pourrais bien grignoter avant de rentrer chez moi. Il n’y a pas grand monde à l’intérieur, mais ce n’est pas très étonnant au vu de l’heure. Je prends un sandwich si particulier avec des yakisoba à l’intérieur, accompagné d’un melon pan et d’une bouteille d’eau. Ça sera parfait. Je passe à côté d’un homme qui parle. Il me parle ? Oui idiot il n’y a personne d’autre à côté de vous.  J’avoue que je n’arrive pas du tout à suivre ce qu’il vient de me dire. Mauvais pour son karma ?

- Hein ? Excusez-moi ? Qu’est ce qui est mauvais pour votre karma ?

Je lui rends son sourire et je me gratte légèrement les cheveux avec deux doigts. J’attends une réponse mais je ne suis pas convaincu que le jeune homme soit dans son état normal. Après tout il est peut-être sorti d’une sortie étudiante et qu’il est potentiellement alcoolisé. Je devrais le surveiller du coin de l’œil alors je reste près de lui au cas où il aurait besoin d’aide. Finalement je ne vais pas rentrer tout de suite à la maison. J'ai envie de m'assurer que l'autre étudiant arrive bien à sa destination. Après tout je ne suis pas si fatigué que ça pour le moment.

- Est-ce que tout va bien ?

Je ne peux pas m’empêcher de regarder le jeune homme qui se trouve à côté de moi. J’ai peur qu’il me fasse une réflexion à force de l’observer. Mais en même temps, si je ne l’observe pas j’ai peur qu’il tombe ou quelque chose comme ça. Et sincèrement je préférerai largement éviter ça. Ou alors, encore pire, qu’il me vomisse dessus. Je sais bien qu’il a un masque mais s’il vomit, ça peut passer à travers ou alors il peut s’étouffer avec. Dégoutant et rien qu’à l’idée ça m’arrache une belle grimace.  A le voir comme ça, je suis maintenant sûr à 99% qu’il est alcoolisé. Et pas qu’un peu. Je ne sais pas ce qu’il avait à fêter mais en tout cas il a fait ça très bien. Je me demande s’il va me répondre un jour à ma question sur son bon ou mauvais karma. Finalement une réponse finie par venir, totalement déconnecté du reste.

- Ah oui… Effectivement, si vous ne payez pas vous risquez d’avoir un mauvais karma.

Je ne sais pas s’il y a un bon moment pour avoir un mauvais karma en tout cas. Je préfère garder mon bon karma et aller payer mes articles, rajoutant une bouteille d’eau pour mon ainé histoire d’éponger un peu l’alcool. Je vérifie que le jeune homme fasse de même avec son paquet qu’il a entre les mains, au pire je pourrais toujours me décider à lui payer. Ce n’est pas l’article le plus cher du combini. Je ne peux pas m’empêcher de sourire lorsqu’il me demande si je veux manger et si j’ai faim. Je pense qu’il n’a pas encore repéré mes mains pleines de nourriture.

- Ne t’en fait pas j’ai ce qu’il faut pour manger moi aussi. J’avoue que je commence à avoir vraiment faim.

Mon ventre commence à vraiment grogner. Je n’ai rien mangé depuis des heures et des heures et ça commence à se faire sentir. Même si j’ai fumé une cigarette ça n’a pas du tout étanché ma faim. Je hausse doucement les épaules quand il me demande de manger avec lui. De toute façon au point où j’en suis, je n’ai plus aucun métro, le taxi ne sera pas spécialement plus cher dans une heure ou deux. Et au moins je ne mange pas seul, je ne réveille pas mon frère non plus. Ça se trouve il va falloir que je surveille ce phénomène toute la nuit. Je vais être en forme pour demain matin tient.

- Mangeons ensemble !

Nous finissons par sortir de l’épicerie. Il y a pas mal de vent. Et je commence à avoir vraiment froid dehors. Alors j’espère qu’on trouvera un endroit où on peut s’abriter pour manger. Je serre comme je peux ma veste sur mon corps frêle et frissonnant. Je ne peux pas m’empêcher de rire un peu quand il m’explique que ses amis sont partis dans une direction et lui dans l’autre, me redemandant si je veux manger avec lui.

- Oui oui bien sur je veux manger avec toi. Mais trouvons un endroit où on peut se mettre à l’abri. Il ne fait pas très chaud dehors à cette heure de la nuit.

Je commence à marcher tranquillement vers l’endroit où il me dit habiter. Comme ça, au besoin, je n’aurais plus grand-chose à faire pour le ramener. Je finis par trouver un endroit plus ou moins à l’abri où on pourrait s’installer pour manger. Bon c’est par terre et je suis en jupe collant. Ce n’est vraiment pas pratique mais au moins ici il n’y a pas de vent. Je pose ma guitare sur le sol et je sors mon ordinateur de mon sac, le glissant avec ma guitare, pour pouvoir m’installer dessus sur le cuir.

- Ça te va ici ?

Bon ce n’est pas merveilleux mais c’est mieux de rien. Je finis par lui donner la bouteille d’eau que j’ai pris pour lui.

- Tiens c’est pour toi, de l’eau ça peut te faire que du bien.