Sakito avait un travail important à faire en anglais qu’on lui avait remis la veille. Si important qu’il avait décidé de venir très tôt à l’université pour commencer à le faire. Et il ne comptait pas perdre de temps pour le faire. Surtout qu’il avait du temps devant lui pour le faire aujourd’hui et qu’il ne savait pas quand il en aurait de nouveau. Les devoirs allaient commencer à s’accumuler de plus en plus et il était donc hors de question qu’il perde du temps. Il y avait encore un peu de temps avant les examens mais il fallait qu’il mette un maximum de chance de son côté pour avoir son semestre avec les félicitations. En soit la lecture du livre en anglais n’allait lui posait aucun souci, il ne restait plus que la rédaction du devoir à faire. Et ça allait lui prendre surement quelques heures. Du moins s’il travaillait à l’université. S’il décidait de ramener le livre chez lui, ça lui prendrait surement plusieurs jours au vu du nombre de distraction qu’il pouvait avoir.  

Aujourd’hui le blond avait décidé de s’habiller confortablement pour pouvoir travailler. Et aussi pour ne pas prendre trop de temps dans la salle de bain. Même s’il lui fallait bien un bon quart d’heure pour se coiffer et se maquiller. Une queue de cheval simple, un maquillage passe partout. Un pull sur le dos avec une jupe un peu longue et un collant en laine fine. Même si les journées étaient encore belles et assez chaudes, il faisait frais le matin et une fois la nuit tombée. Sac à dos sur le dos avec son ordinateur portable à l’intérieur, il s’était directement rendu à la bibliothèque pour récupérer le livre dont il avait besoin.

Il alla jusqu’à l’accueil pour enregistrer son emprunt, il n’en aurait surement que pour quelques jours, le temps de finaliser son écrit avant de le rendre. Il voulait que ça soit parfait. Surtout en anglais. Il ne se laissait pas le choix. Et finalement cette pression qu’il se mettait lui réussissait plutôt bien avec des excellents résultats lors de sa première année et de son premier semestre de deuxième année. Le livre dans les mains il était en train de chercher où s’installer pour travailler au calme. Sakito élimina d’emblée les tables proches de l’entrée ainsi que celles proches de l’accueil. Beaucoup trop de passage et des personnes pourraient le déconcentrer. Il fallait donc qu’il trouve une place cachée au milieu des livres. Et comme il était tôt il avait encore le choix. Il n’y avait que quelques élèves présents pour le moment.

Perdu dans ses pensées, il commença à bouger à la recherche de la table parfaite pour s’installer. Il finit par trouver et il se dirigea vers la table de son désir. Du moins jusqu’à ce qu’un jeune homme vienne l’aborder.

Sakito était en train de se rendre vers la table qu’il avait choisi, le livre dans ses mains jusqu’à ce qu’un autre jeune homme vienne l’aborder. L’aborder ? Non c’était plus une agression verbale que simplement aborder une autre personne. Et il ne comprenait pas vraiment pourquoi. Il avait quelque chose qui lui appartenait ? Il ne pensait pas et ça faisait froncer les sourcils au plus âgé. Il était loin d’être un voleur et il n’avait jamais vu ce garçon de toute sa courte existence. Alors il ne comprenait pas comment il pouvait avoir quelque chose qui lui appartenait. Il finit par comprendre que c’était le livre qu’il avait entre les mains qui intéressait l’autre. Il regarda la main tendue avec dédain, serrant le livre contre sa poitrine. Pour le moment il n’avait pas sorti un mot, mais il était passablement énervé qu’on vienne l’agresser de cette manière. Il tapait nerveusement du pied contre le sol, il lui faudrait surement un moment pour arriver à se détendre.

- Je vois pas pourquoi je te passerai le livre. Je suis venu le récupérer en premier et moi aussi j’ai un devoir à faire. Il ne me semble pas que ton nom soit écrit à l’intérieur.

Habituellement le blond était plutôt gentil et bonne patte. Il aurait surement volontiers accepté de partager le livre pour qu’ils s’en servent tous les deux en même temps. Mais là, il en était totalement hors de question. Il allait travailler tout seul dans son coin et rendre le livre quand il n’en aurait plus besoin. Il n’avait vraiment aucun scrupule à ce que l’autre se prenne une mauvaise note. Surtout qu’à priori, s’il avait bien compris, il devait le rendre pour la première heure demain. Il essayait de garder son calme pour essayer de ne pas parler à trop haute voix pour ne pas se faire virer de la bibliothèque.

- Que tu te sois organisé comme un pied pour faire ton devoir ça ne regarde que toi. Ca te servira de leçon et tu apprendra à t’organiser et pas tout faire à la dernière minute.

Il avait beau essayer de faire descendre la colère qui était en lui, il n’y parvenait pas. Quel toupet de venir l’aborder de cette manière. Ce n’était pourtant pas du tout dans son caractère et il avait du mal à avoir un peu de compassion pour l’autre jeune. Il n’était pas du genre à mettre les autres en difficulté. Maintenant il fallait qu’il trouve un endroit où il serait tranquille pour travailler sans que cet abruti ne l’agresse toutes les trente secondes pour avoir CE bouquin. Il comptait bien faire son devoir en avance pour ne pas se mettre en retard ensuite. Surtout qu’il savait pertinemment que d’autres élèves de son cours allaient être intéressés par ce livre et il ne l’aurait potentiellement plus aussi facilement. Décidant d’ignorer le jeune homme il se décida à chercher une place au calme où il pourrait travailler seul. Si l’autre voulait vraiment le livre il n’avait qu’à essayer par une autre méthode que celle qu’il venait d’essayer.

L’androgyne reprit lentement sa respiration. Il était véritablement en train de l’énerver mais il ne fallait pas qu’il le laisse gagner la guerre. Il aurait ce livre coute que coute, il comptait bien faire son devoir aujourd’hui pour en être ensuite débarrasser. Mais pour cela il fallait qu’il reste un maximum calme. Bien sur il pourrait éventuellement partager le livre. Il avait réfléchi à cette opportunité dans un coin de sa tête. Mais vu comment le jeune homme se comportait avec lui il n’en avait pas le moins du monde envie. Peut être qu’éventuellement s’il mettait de l’eau dans son vin il voudrait bien mettre le livre au milieu pour qu’ils puissent le lire ensemble et ils feraient ensuite chacun leur devoir dans leur coin. Cet énergumène cherchait par tous les moyens de l’emmerder. Ca serait donc compliqué de pouvoir travailler comme ça.

- Parce que quand j’ai demandé le livre à l’accueil, il n’était pas emprunté par personne. Donc je suis le premier. Et donc je suis le premier à pouvoir travailler dessus.

Sakito allait s’installer dans un endroit plutôt calme mais en voyant que l’autre étudiant était en train de le suivre il continua à marcher à travers les rayons. Il avait maintenant une toute nouvelle stratégie à laquelle il n’avait pas pensé jusqu’alors et qui lui promettait éventuellement la tranquillité. Les « insultes » que l’autre pouvait lui faire ne l’intéressait pas le moins du monde. Au contraire, elle le faisait même sourire. Il commençait à passer au-dessus du cap de l’énervement et ce n’en était pas plus mal. Bien au contraire. Plus l’autre était en train de s’énerver plus il était en train de gagner le petit jeu. Ça le faisait pratiquement rire de le voir se battre parce qu’il n’était pas assez organisé. Le fait de se faire traiter de lèche botte laissa un sourire s’échapper sur ses lèvres.

- Et bien… J’en ai besoin parce que j’ai une vie bien remplie. Une organisation à laquelle je ne dois pas déroger pour profiter de tous mes loisirs en dehors des cours. Et oui tu peux m’appeler fayot ou premier de la classe si ça te fait plaisir, ça ne me dérange pas le moins du monde. Au contraire, je m'en sens même flatter. Je mets un maximum de chance de mon côté pour réussir mes études et avoir un bon poste quand je les aurais terminés.

Il ne se sentait pas spécialement lèche botte avec les professeurs. Il n’allait que très rarement les voir en fin de cours. S’il avait des questions il les posait plutôt en cours pour que tout le monde puisse en profiter. Il ne cherchait pas spécialement à être le premier de sa promotion, la compétition ne l’intéressant pas le moins du monde, mais il voulait au moins se donner d’avoir les notes maximales dans chacune des matières. Et pour cela il se devait de travailler sérieusement et avoir fini ses devoirs en avance. Pour lui, la rigueur passait par ce point. Et éventuellement, s’il n’arrivait pas sur un devoir il pouvait toujours envoyer un mail au professeur pour avoir quelques éclairages.

L’étudiant en littérature se balada à travers les rayons, le livre bien collé contre sa poitrine, bien serré dans ses mains. Il fit un petit tour de la bibliothèque avant de retourner vers l’accueil. Il allait s’installer sur la table en face de l’accueil, là où il y a toujours au moins une bibliothécaire pour veiller sur eux et répondre leur question en cas de besoin. Comme ça si l’autre tentait quelque chose contre lui il serait vu et revu et potentiellement mis à la porte s’il commençait à s’en prendre physiquement à lui. Travailler en étant toujours sur ses gardes n’allait pas être simple mais bon. Il regarda la bibliothécaire et s’assura qu’elle entende bien ce qu’il allait dire.

- Bien. Maintenant j’aimerai bien pouvoir travailler sans que tu ne me harcèles constamment. Ce n’est pas que mais moi aussi j’ai un devoir à rendre. Et je ne compte pas le faire un autre jour.

Il comptait sur le soutien de la bibliothécaire qui lui avait indiquer en premier l'emplacement du livre et à qui il avait dit qu'il voulait l'emprunter.

Sakito restait calme à tout ce que l’autre jeune homme était en train de lui dire même s’il sentait bien qu’il allait finir par se prendre un coin de poing, ou de pied, parce qu’il ne voulait pas lui donner ce foutu livre. Mais il était hors de question qu’il perde. Alors il essayait une autre stratégie. Peut être que celle là permettrait qu’il soit enfin tranquille pour faire son devoir. Passant à travers les rayonnages des livres il se retrouva à l’accueil où il voulait finalement s’installer sous les yeux de la bibliothécaire. Mais l’androgyne n’avait pas du tout pensé que l’autre ferait un numéro plus que pitoyable à la femme. Il ne s’attendait tellement pas à ce reversement de situation. Finalement il faisait bien la pleureuse.

Il ne fallut pas longtemps pour que la bibliothécaire réagisse et les installe chacun d’un côté de la petite table et le livre au milieu. Avec l’obligation de se taire par-dessus. Si ça ne tenait qu’à lui Sakito prendrait bien le livre vers lui. Mais il était certain que l’autre allait faire un esclandre s’il faisait ça. Et ils allaient se faire virer, plus ou moins définitivement, tous les deux. Et il en était hors de question. Mais d’un autre côté il n’était pas convaincu que l’autre ne tente pas de faire comme lui au vu de sa fourberie. Il fallait qu’il travaille aujourd’hui. Alors il fallait surement qu’il mette de l’eau dans son vin. Il retient un soupir d’exaspération puis il finit par dire à voix basse.

- Bon… Si on veut pas se faire virer tous les deux… Il va falloir qu’on prenne sur nous et
qu’on bosse ensemble sur le livre… Ca te va ?

Bon il n’était pas sur qu’il dise oui mais Sakito était déjà en train de bouger sa chaise pour se mettre à côté de l’autre jeune homme. Histoire qu’il puisse lire tous les deux dans le bon sens. Même s’il savait lire à l’envers ça serait surement plus confortable pour tous les deux. Il s’installa à une certaine distance pour ne pas l’importuner pour autant. Fermant les yeux pour prendre sur lui il attrapa le livre pour le mettre vers eux.

- Il faut que tu le lises en entier ? Ou juste une partie ?

Il avait besoin de le lire en entier mais il pourrait se contenter d’une petite partie pour commencer son analyse si l’autre en avait besoin. Il espérait que l’entente se passe plus ou moins bien même si c’était plutôt mal parti.