La rentrée aura lieu dans quelques jours. Et je n’arrive pas à taire la sombre angoisse qui me prend un peu aux tripes depuis que j’ai commencé à emménager dans la résidence universitaire. J’avais besoin de prendre le large, par rapport à mes parents beaucoup trop sur mon dos depuis l’accident. J’avais besoin… d’indépendance. Donc c’est une bonne chose mais pour autant… je me sens un peu perdu. Reprendre des études depuis le début… c’est très significatif. C’est… un nouveau départ. La vie ne m’a pas réellement laissé le choix de tout recommencer. Mais j’essaie… de voir le bon côté des choses. Je cherche… un nouveau but à ma vie. Qui sait, la littérature sera peut-etre une révélation pour moi ? Peut-etre. De toutes manières, il fallait bien tirer un trait sur la musique… alors tant qu’à faire, autant se tourner vers un art qui y est parfois rattaché ? J’écrivais bien certains textes de chanson, après tout alors… autant essayer d’aller plus loin en étudiant d’autres écrivains. Des bien plus doués que moi.

Mais avant ça, je dois trouver mes marques dans mon nouveau chez moi. J’essaie d’agencer toutes mes affaires dans les placards et armoires fournies dans le petit appartement. J’ai trop d’affaires je crois. J’aurais dû faire un peu plus de tri dans mes fringues notamment. J’ai l’impression que je vais me noyer sous cet amas de tee-shirt et j’en viens presque à désespérer. Je peine à trouver de la place pour tout. Mais il faudra bien pourtant.

Je prends une pause pour m’avachir sur la chaise de mon petit bureau qui me servira sûrement aussi de table à manger plus tard, et pour boire un peu d’eau alors que le radiateur s’est enfin mis en marche et dévore l’espace de sa chaleur. Et alors que je verse entre mes lèvres quelques gouttes fraichement sorties du frigo et que mes doigts libres tâtonnent pour baisser la température, je remarque que le voyant au-dessus de ma porte s’est allumé. Une installation précaire organisée avec le service technique de la résidence, en remplacement de la sonnette. Elle sonne toujours, oui, mais comme je ne peux pas l’entendre, elle déclenche cette petite loupiotte rouge qui clignote au-dessus de l’entrée. Il est prévu qu’elle se transforme d’ici quelques temps en visiophone. Mais en attendant je n’ai que ça pour me signaler que quelqu’un est à ma porte et demande à me voir. Aurais-je de la visite ? Intrigué je m’approche de la porte et jette un œil par le judas à l’extérieur. Je découvre alors une jeune fille à la tête brune que je ne crois pas avoir déjà rencontré. Est-ce qu’elle travaille ici ? Peut-etre qu’il manquait finalement un papier à mon dossier particulier ? Je finis par ouvrir la porte donc et adresse un sourire à la demoiselle sur mon palier. « Bonjour ? C'est pour quoi ? » Je lâche simplement, une pointe de questionnement dans la voix. « Si vous voulez me parler, faîtes le bien face à moi… sinon je ne vais pas vous comprendre. » J’explique à ce petit bout de femme sans remarquer sa stupeur pour le moment, persuadé de ne pas pouvoir être effrayant pour qui que ce soit.

( Pando )

Ayame resta interdite quand un visage totalement inconnu au bataillon ouvrit la porte de son ami. Elle ne pouvait pas s’être trompée de porte, elle était venue plusieurs fois chez Hotaru et connaissait le « chemin » par cœur. Alors pourquoi ce type était chez lui ? Elle ne comprenait pas. Où était-il passé ? Prise de panique à l’idée de devoir converser avec une personne qu’elle ne connaissait pas, qui plus est un homme, elle recula d’un pas, instinctivement, et baissa la tête.
Le jeune homme qui se tenait dans l’encadrement de la porte lui demanda quelle était la raison de sa visite, et avant qu’elle n’ait pu réagir, il renchérit en lui expliquant que pour lui parler, il fallait qu’elle se mette bien en face de lui pour qu’il puisse la comprendre. Surprise, Ayame releva la tête et croisa le regard de son voisin l’espace d’un instant. Etait-il malentendant ? Cela risquait d’être prometteur avec elle qui ne pipait mot … Elle plongea sa main dans la poche de son gilet pour en extirper son téléphone portable et commença à rédiger rapidement un message :

« Bonsoir. Malheureusement je suis dans l’incapacité de m’exprimer oralement. Je pensais venir voir mon ami, mais visiblement je fais erreur. Je suis désolée de vous avoir dérangé. »

Timidement, elle tendit le téléphone au jeune homme afin qu’il puisse lire le message qui s’y affichait. Elle espérait qu’il comprendrait le malentendu et qu’il ne lui en voudrait pas de l’avoir dérangé pour rien. S’il était organisé comme elle, il était sûrement en train de se préparer pour la rentrée et il venait de se faire interrompre sans raison aucune. Mais bon, les situations de ce genre semblaient s’accumuler dans la vie de la jeune femmes ces derniers temps …

(désolée c’est un peu court, faut se remettre dans le bain ahaha)

( Pando )

Je ne m’attendais pas à la visite de cette jeune femme. Qu’est-ce qu’elle me veut ? Est-ce que j’ai fait trop de bruit en m’installant ? C’est possible après tout puisque je n’entends rien… mais bon normalement, je ressens au moins la force des vibrations. Aussi, si les murs avaient tremblés je m’en serais aperçu. Je suis donc d’autant plus intrigué de sa présence. Mais elle sembla elle-même choquée par la mienne. Pourtant c’est bien elle qui est venue sonner à ma porte. De plus en plus étrange cette histoire. Elle a baissé les yeux, reculé d’un pas. Est-ce que je lui fais peur ? D’accord, je suis grand, ça peut sembler impressionnant. Ma propre bêtise me donne envie de rire mais je me retiens. Je ne voudrais pas qu’elle croit que je me moque. Au lieu de ça je penche la tête sur le côté, pour l’inviter à me répondre vu qu’elle tarde à le faire. Finalement je la vois fouiller ses poches et en sortir son téléphone. Je fronce les sourcils, une fois de plus interloqué par cette situation incongrue. “N’appelle pas la police, je jure que je ne suis pas dangereux !” je lui adresse, avec un léger rire dans la voix devant mon exagération avant de constater qu’elle est en train de taper quelque chose. Prenant mon mal en patience, je la regarde faire et finalement, elle pointe l’écran de son portable face à mon visage. Je découvre les quelques lignes qu’elle m’adresse et ouvre la bouche dans une exclamation de compréhension : “Aaaaah d’accord !”. Je finis par acquiescer et lui sourire. “Y’a aucun dérangement. Ne t’inquiète pas.” je lui adresse en secouant légèrement la tête pour appuyer la négation de ma phrase. “J’étais en train de m’installer. J’espère que je n’étais pas trop bruyant.” dis-je, enchaînant en m’écartant un peu de la porte pour qu’elle constate l’étendue du carnage, à savoir le monticule de fringues dont je n’ai pas encore trouvé la place. Riant pour masquer mon désespoir face à un tel spectacle je finis par hausser les épaules. “C'est le bordel. Au fait, je m’appelle Akira, si jamais… ça t’intéresse.” dis-je par politesse en lui tendant la main en espérant qu’elle la saisisse en retour. “Je suis désolé d’avoir pris la place de ton ami.” prononcé-je, me doutant par son comportement, qu’elle est légèrement angoissée par la situation. Enfin j'espère ne pas surinterpréter et faire du mélo d'un rien. “Si t’as besoin de quelque chose… bah n’hésite pas.” une phrase là aussi qui veut attirer sa sympathie. Je ne vois pas vraiment quelle aide en réalité je pourrais lui apporter. Enfin c’est un détail. Le temps nous dira bien si ma proposition lui est utile ou non.
“Tu veux entrer ? Je peux… te proposer de l’eau. Ou de l’eau chaude. Avec du thé. C’est pas magnifique ça ?” Certaines personnes me disent avenant. D’autres pensent que je suis toujours trop gentil et que ça cache forcément quelque chose, que c’est hypocrite. Ils ont tous raison. Parfois mon sourire et mes propos peuvent être un peu hypocrites. Non pas que je me soucie de ce qu’on pense de moi, que je fasse semblant d’être quelqu’un d’autre. Disons juste que parfois, mes sourires s’adressent à des gens que je n’apprécie que moyennement. Plus par tact que par réelle hypocrisie du coup. Pourquoi se lancer dans un conflit inutile avec des gens qui n’en valent pas toujours la peine à mes yeux ? Et puis parfois, comme dans ce cas-là, ma gentillesse est montrée simplement pour créer du lien avec la personne. Les relations humaines sont importantes. D’autant plus avec ses voisins. Si l’on peut bien s’entendre, ça n’en sera que tout bénef.
#6699cc

( Pando )

Ayame était vraiment abonnée aux malentendus et aux situations complexes avec les hommes, ces derniers temps. Et surtout, elle était devenue la spécialiste des abandons. D’abord sa première amie Yuzu qui avait disparu, puis maintenant Hotaru qui se volatilisait. Comment l’avait-elle su ? Elle venait de frapper à la porte de son ami, heureuse de le voir, et était tombée sur un visage totalement différent. Elle s’était d’ailleurs sentie très bête, puis un brin paniquée à l’idée d’être face à un inconnu sans vraiment s’être préparée mentalement, et puis finalement, elle lui avait rédigé un message d’explication pour lui signaler le fait qu’elle ne pouvait pas parler. Elle avait également ajouté la raison de sa venue, afin qu’il ne la prenne pas pour une folle.
Il ne sembla pas dérangé par la situation et lui assura à voix haute que tout allait bien, lui permettant de se détendre. Elle commençait bien sa rentrée en 2ème année tiens ! Le jeune homme précisa qu’il était en train de s’installer et s’inquiéta de savoir s’il était bruyant. Ayame secoua négativement la tête pour le rassurer, elle n’avait été nullement perturbée par son installation. Il lui laissa entrevoir le bazar chez lui, déclenchant un léger sourire sur le visage de la demoiselle. Visiblement, le jeune homme était de nature bavarde, puis qu’il enchaîna entre sa présentation, des excuses vis-à-vis du fait qu’il avait remplacé Hotaru, le signalement qu’il était là en cas de besoin. Beaucoup d’informations d’un coup pour Ayame qui plissa le front pour se concentrer et tout retenir, acquiesçant spontanément pour acquiescer au fur et à mesure que le dénommé Akira s’exprimait.

Puis ce dernier proposa subitement d’entrer chez lui. Pour boire de l’eau. Chaude. Du thé. Il avait l’air un peu perdu dans sa proposition, maladroit. Instinctivement, Ayame fit un pas de recul, toujours aussi effrayée. Mais elle prit une grande inspiration, son objectif de cette année était de s’affirmer et de doucement reprendre confiance en elle et les hommes. Ce n’était pas parce qu’elle avait eu affaire à un connard il y a 5 ans qu’ils étaient tous des animaux. Il fallait juste qu’elle se le mette dans la tête. Mais tout en restant méfiante.
Réfléchissant un instant, et concluant qu’après tout, maintenant qu’elle était sur le palier, ce serait presque impoli de refuser, Ayame rédigea rapidement une réponse sur son téléphone :

« Enchantée, Je m’appelle Ayame. Et pour mon ami, ce n’est pas grave. Le plus triste est que je n’étais pas au courant de son départ …
Merci pour ta proposition, j’y penserai.
Et … C’est d’accord pour ton invitation à boire un thé. C’est gentil. Mais tu n’es pas trop occupé avec ton emménagement ? »

Ayame s’était épanchée plus que prévu, s’exprimant vis-à-vis d’Hotaru. Mais cela faisait plus humain que de juste balancer des banalités, s’était-elle dit. Maintenant, il fallait respirer un grand coup, et se dire que tout allait bien se passer.

( Pando )