septembre 2019

Mia lisait tranquillement sur son lit. Il était déjà un peu tard mais elle n'était pas fatiguée. Elle sentait que si elle dormait maintenant elle allait faire un cauchemar, alors elle préférait continuer de lire encore un peu plutôt que de s'endormir avec de mauvaises ondes. Elle était étalée sur le ventre, sa peluche lui servant de coussin pour maintenir sa tête à la bonne hauteur. Mia pouvait lire dans n'importe quelle position. Takeo lui avait souvent fait la remarque d'ailleurs.

Alors qu'elle commençait légèrement à piquer du nez et à relire trois fois la même phrase, elle se dit qu'il était peut être temps de dormir. L'étudiante se redressa alors pour récupérer son marque page et fermer son livre. Elle se leva pour aller se brosser les dents, parce qu'elle avait grignoter en lisant. Mais alors qu'elle posait un pied dans la salle de bain on toqua à sa porta. Elle arqua un sourcil. Qui pouvait bien toquer chez elle à cette heure ci ?

Elle vint alors ouvrir la porte et resta surprise en voyant Ayame, elle n'avait pas l'air très bien. « Ayame ..? » Mia ne perdit pas de temps et la fit entrer chez elle avant de referme la porte. Elle aida son amie à s'asseoir sur le lit et l'observa en venant à coté d'elle. « Qu'est ce qui ne va pas..? » Elle était inquiète pour son amie et se releva finalement pour lui servir un verre d'eau le temps que Ayame se décide à lui raconter, elles avaient toute la nuit après tout. La jeune femme tendait le verre à son amie en revenant s'asseoir près d'elle.

Ayame était épuisée de cette soirée pleine d’imprévus. Si elle avait su par avance que cela finirait ainsi, elle ne se serait jamais rendue seule à cette exposition sur les jeux vidéo à Roppongi Hills. Elle aurait attendu que Yuzu soit disponibles et elles y seraient allées ensemble. D’ailleurs n’avait-elle pas aussi perdu son cadeau pour elle ? Elle fouilla dans son sac et retrouva le petit objet, rassurée. Elle en profita pour sortir son trousseau de clefs, puisqu’elle était enfin devant la porte de sa chambre.

Ce jeune homme qui travaillait dans les métiers de la nuit malgré son apparent jeune âge avait beau ne pas être une mauvaise personne, il avait donné du fil à retordre à la jeune femme qui en avait vu de toutes les couleurs. Mais la bonne nouvelle était qu’elle avait récupéré sa carte Suica et qu’elle avait réussi à rentrer à la résidence sans faire de crise de panique.

Après de longues minutes à observer le plafond, Ayame réalisa qu’elle était bien trop nerveuse pour dormir, et elle se releva. S’observant rapidement dans le miroir de la salle de bains, elle avait encore le teint livide, marques des événements de la soirée. La rentrée n’était même pas encore là qu’il lui arrivait déjà des chamboulements. Si cela remontait aux oreilles de Mme Sakurai, elle la renverrait aussitôt chez eux et la déscolariserait peut-être …
Son premier réflexe fut d’aller voir Mia. L’avantage d’habiter dans la même résidence : se voir quand le besoin se faisait ressentir. Elle se rendit donc à l’étage de son amie et frappa à la porte.
Mia avait l’air à moitié endormie et Aya’ culpabilisa aussitôt de l’avoir dérangée. Mais la jeune fille ne lui en tint pas rigueur, la fit entrer et asseoir sur le lit. Elle lui demanda ce qui n’allait pas avant d’aller lui chercher un verre d’eau. Pendant ce temps, Ayame, voulant faire de l’humour, avait écrit :

T’es pas prête pour le pavé qui va suivre.

Esquissant un sourire un peu faussé, elle tendit le téléphone à Mia et une fois la boutade lue, elle reprit son téléphone et entreprit de raconter son histoire. Elle aurait pu lui expliquer dans le train mais il lui avait fallu redoubler d’efforts pour supporter le wagon bondé, les gens qui la collaient par inadvertance. Elle avait failli tomber dans les pommes.

Comme tu le sais, je suis allée à cette expo de Roppongi Hills. C’était super cool ! J’ai même fait ma thug en prenant une photo en cachette pour Yuzu. Bref, j’étais tellement captivée que je n’ai pas réalisé qu’il faisait nuit quand je suis sortie. J’ai pas voulu t’inquiéter car mon trajet jusqu’à la gare était court, mais un host ou quelqu’un du genre m’a abordé, j’ai paniqué, j’ai couru, j’ai perdu ma carte Suica, je suis revenue, il l’avait. J’ai cru à un vol, mais il était sympa, il me l’a rendue et m’a dit de pas m’inquiéter. Je me sentais un peu coupable de l’avoir mal jugé mais c’est plus fort que moi, le monde de la nuit me fait flipper tu sais. Et puis ben on a « discuté » un peu et j’ai fini par rentrer. Le pire je crois c’était le train bondé et les gens collés de partout … C’était affreux ! Vraiment, je suis épuisée mais je n’arrivais pas à dormir. Désolée de t’avoir réveillée … TT

Son pavé écrit, elle tendit le téléphone à Mia et lui laissa le temps de lire pendant qu’elle buvait le verre d’eau à petites gorgées.

septembre 2019

C'était Ayame qui toquait à sa porte. Aussi tard. C'était qu'il y avait un problème. Elle ne devait pas réussir à dormir. Mais pourquoi. Quelque chose avait du se passer. Alors Mia la laissa entré et l'invita à s'asseoir sur le lit. Elle lui demandait ce qu'elle avait alors qu'elle servait un verre d'eau à son ami. Ayame lui montra alors un premier message. Le pavé ? Mia fronçait un peu les sourcils. Elle espérait que ce n'était pas trop grave tout de même.   Son amie avait l'air tout même assez calme, enfin elle n'était pas en pleine crise de panique quoi, alors c'est que ce n'était pas aussi grave que ce que Mia aurait pu imaginer.

Elle s'installa alors à son tour sur le lit et attendit patiemment que son amie rédige son histoire. Mia avait pris l'habitude d'attendre que Ayame mettent les mots sur ses pensées.  ça ne la dérangeait pas le moins du monde. Elle avait assez de patience pour ça. Et puis c'était comme ça, ce serait idiot de sa part de ne pas apprécier. Elles ne pourraient pas être amie si Mia ne s'était pas faite au silence d'Ayame. La jeune femme sourit un peu en s'asseyant en tailleur sur le lit.

Elle pris ensuite le téléphone que lui tendait son amie. C'était effectivement un long message. « Ah oui tu ne mentais pas en parlant de pavé » Mia sourit avant de lire avec attention l'histoire de son amie. Elle fronçait les sourcils. Quoi, elle était rentrée seule de nuit. Mais.Elle ne voulait pas l'inquiéter. Mia releva les yeux de l'écran un instant. « Tu sais que tu aurais pu m'écrire sur le trajet ..» Elle aurait aussi pu l'appeler Même si Ayame ne parlait pas Mia pouvait faire la conversation pour occuper l'esprit de son amie pendant qu'elle rentrait chez elle. Elle aurait aussi pu la récupérer à la gare. Mais elle était tout de même fière que Ayame ait réussi à rentrer seule sans faire de crise de panique. .

Mia continua alors la lecture du récit de son amie. Oh, un host ?! Elle fit une moue avant de lire qu'il avait été gentil avec elle finalement et qu'il  lui avait rendu sa carte de transport.  « Tu as eut de la chance ! Heureusement ... Et oui, j'imagine le train ça a du être compliquée. Mais je suis fière de toi, tu as réussi à rentrer tout de même. » Elle sourit en rendant son téléphone à Ayame.  « Tu as pris une tisane pour te relaxer avant de dormir ? » Mia faisait ça quand elle était un peu stressée. Elle en avait une qui fonctionnait bien.

Mia avait souri lorsqu’elle avait réalisé qu’effectivement, Ayame lui avait rédigé un beau pavé. A son tour elle avait souri, si elle avait su parler elle était persuadée qu’elle n’aurait jamais pu débiter autant d’informations d’affilée, sans faire de pause. En parlant de pauses, Mia interrompit plusieurs fois sa lecture pour commenter les événements, à commencer le fait qu’elle aurait pu lui écrire sur le trajet ou l’appeler. Il arrivait parfois que Mia parle toute seule de l’autre côté du combiné pour apaiser Ayame quand celle-ci ne se sentait pas bien, et dans ce genre de moments la jeune fille arrivait parfois à émettre de petits sons discrets tels que « hm ». Elle retint la réaction de Mia pour lui expliquer, une fois sa lecture achevée, pourquoi elle n’avait pas pu l’appeler.

Lorsque son amie eut terminé de lire le long message explicatif, sa réaction fut extrêmement positive : elle lui avouait qu’elle avait eu de la chance de tomber sur une personne bienveillante, car après tout, les gens travaillant dans les métiers de la nuit étaient connus pour ne pas être toujours des anges. Elle la félicitait aussi d’avoir géré son stress seule et d’avoir été capable de rentrer par ses propres moyens. Oui, ça c’était vraiment un sacré pas en avant pour la jeune fille, d’avoir affronté autant de peurs ce soir-là. Mais elle n’était pas prête de recommencer de sitôt, il allait lui falloir un peu de temps pour s’en remettre. Quant à la tisane, non, elle n’y avait pas pensé, elle secoua donc négativement la tête à la question finale de Mia, reprit le téléphone et s’empressa d’écrire :

Je ne t’ai pas appelé car franchement, j’ai utilisé le peu d’énergie qu’il me restait après tout ça pour survivre au train sans tomber dans les pommes. Je m’attendais vraiment à faire une crise de panique dans le train … Et non, je n’ai pas pris de tisane, je n’y ai même pas pensé. Tu en as ?

Ayame tendit à nouveau le portable à Mia et soupira. La journée avait été éprouvante pour elle, mais au fond, elle ne regrettait rien. C’étaient typiquement ce genre d’expériences qui la rendraient plus forte, l’endurciraient et l’inciteraient à reprendre courage et à passer au-dessus de tout cela. Car ça faisait déjà 5 ans et demi que ça durait, et elle en avait assez d’être faible, apeurée, de ne pas pouvoir vivre sa jeunesse comme elle l’entendait, juste parce qu’un connard avait détruit sa vie pour assouvir une pulsion malsaine. Parfois, elle se demandait comment l’autre femme qu’elle avait aperçue ce soir-là vivait, elle qui avait vécu le traumatisme plus profondément qu’elle. Elle espérait qu’elle s’en sortait, et qu’elle ne s’était pas suicidée. Aya’ reprit un instant le portable des mains de Mia et écrivit :

Franchement, c’était dur mais je suis contente, car je progresse. J’en ai vraiment marre d’être bloquée dans ma bulle, j’espère que la rentrée apportera son lot de changements positifs et que je passerai au-dessus de tout ça. J’aimerais bien que Yuzu, Anna et toi, ainsi que mes parents, puissent entendre ma voix un jour … !

Cela faisait longtemps qu’Ayame ne s’était pas ouvertement confiée face à sa frustration liée à son mutisme avec Mia. C’était devenu tellement automatique entre elles qu’elles en oubliaient parfois que ce n’était pas non plus normal. Mais Ayame croyait en sa rédemption et savait que la roue tournerait.

septembre 2019

Si Mia avait su que Ayame rentrait seule de nuit elle aurait sûrement regardé son téléphone toute les deux minutes pour avoir des nouvelles. Être sûre que rien ne lui arrive. Elle serait même sûrement aller à la gare pour la récupérer. Mais Ayame ne lui avait rien dit et elle se demandait pourquoi. Mais son amie avait sûrement une bonne raison et quand Mia lu sa réponse elle fit une petite moue. Oui, ça semblait presque évident. Elle était trop concentrée pour penser à ça. Mia lui sourit doucement. « C'est vrai.. Et tu n'en as pas fait et ça c'est énorme ! » Vraiment, elle était contente pour Ayame qui avançait peu à peu face à son traumatisme. Et peu importe le temps qu'il lui faudrait, elle allait y arriver. Mia en était persuadée, tout comme elle. Même si Mia elle même avait encore du mal avec certaines choses, comme croiser des inconnus avec le regard insistant dans la rue, sortir de nuit.

Mia était fière de son amie et elle le lui avait dit. Ayame progressait vraiment et c'était une bonne chose. Elle lui avait demandé si Ayame avait tester la tisane pour se calmer un peu pour dormir mieux. Elle lui avait répondu que non, alors l'étudiante s'était levée avant entrain. « Oui, j'en ai une vraiment bien ! Je t'en ai pas parlé encore ? Quelle honte ! » Elle rit un peu et alla récupérer sa boite de tisane avant de lui ramener pour lui montrer. « Camomille Tilleul et Fleur d'oranger, ça n'a pas énormément de goût mais ça me détend bien, tu veux que je t'en fasse une ? Et puis tu pourras prendre la boîte, j'en ai encore en stock, maman m'en a acheté trois.. » Elle rit un peu. Sa mère pouvait être excessive parfois c'est vrai. Elle voulait être certaine que Mia ne manque de rien.

La jeune femme regarda à nouveau le téléphone tendu vers elle pour lire. Elle sourit avant de faire une petite moue en lisant les derniers mots de Ayame. Oh.. C'est vrai que Mia n'avait jamais entendu sa douce voix. Elle ne garda pas sa moue triste longtemps, elle ne voulait pas enfoncé le couteau dans la plaie de son amie. Alors elle lui offrit un sourire réconfortant. « ça viendra avec le temps Aya', je sais que c'est dur mais ne te bloque pas là dessus..Ta vois reviendra j'en suis certaine. » Elle ne savait pas trop si ces mots allaient aider son amie là maintenant.

Ayame appréciait le réconfort de Mia. Lorsqu’elle doutait, elle lui demandait conseil et elle avait toujours les mots pour l’apaiser. Un véritable baume ! toujours était-il qu’elle avait effectivement bien progressé ce soir, et encore elle ne lui avait pas tout raconté. Elle la laissait déjà digérer tout ce qu’elle venait d’écrire concernant l’épisode du host et du train. Puis Mia avait proposé de lui faire une tisane à la fleur d’oranger et à la camomille, proposition reçue très positivement par Ayame qui était très curieuse d’y goûter. Elle avait donc hoché la tête de haut en bas pour confirmer son souhait de boire, car il était inutile de pianoter sur son téléphone pour un simple « oui ». Aya’ sourit lorsque Mia ajouta que si ça lui plaisait elle pourrait garder la boîte car sa mère lui en avait acheté trois. Au final elles avaient un peu les mêmes mamans surprotectrices à l’idée de laisser leurs filles vivre seules dans cette résidence, c’était amusant.

La jeune étudiante avait eu un léger coup de mou et avait avoué à son amie qu’elle espérait de tout cœur que la rentrée serait positive pour elle et l’aiderait à aller de l’avant, qu’elle aimerait que ses proches réentendent sa voix un jour. Elle y croyait, dur comme fer. Il ne fallait pas abandonner. Mais Mia avait raison, chaque chose en son temps, il ne fallait pas forcer l’impossible, et le déclic se produirait quand il devrait se produire. Ayame était persuadée que ça ne viendrait pas tout seul, qu’il y aurait un événement déclencheur.

Merci Mia, comme toujours tu sais réconforter les autres. Bon, et si on goûtait à cette tisane ? Sinon on va faire une nuit blanche.

Elle avait tapé cela rapidement et avait laissé son amie lire. Puis, pendant que Mia s’était rendue à la kitechenette pour faire chauffer de l’eau et préparer ladite tisane, Ayame se remit à pianoter sur son téléphone. Il fallait quand même qu’elle lui raconte la prouesse qu’elle avait faite avec le host !

Mais je ne t’ai pas raconté toute l’histoire encore, mon message était déjà bien assez long ! En fait pour dédommager le type vu qu’il m’avait aidée mais que je lui faisais perdre du temps de travail, je lui ai donné 2000 yens, je suis pauvre maintenant !! Et surtout, il va aussi à la fac ! Je pensais que c’était typiquement le genre de mec à avoir lâché les études mais pas du tout. Je lui ai proposé de l’aider à trouver un meilleur travail et … Je lui ai laissé mon Line. Oui tu as bien lu !!

Le temps qu’elle mette le mot final à son texte, Mia était revenue avec deux tasses de tisane réconfortante. Elle attendit que son amie ait les mains libres pour lui montrer son texte.

septembre 2019

Mia se doutait que pour son amie ce n'était pas simple tous les jours. Tout comme pour elle après tout. Il fallait surmonter les mauvais souvenirs, les cauchemars, les crises d'angoisses qui pouvaient pointer le bout de leur nez à tout moment, sans prévenir. Alors, oui c'était compliqué. Mais Ayame avait vraiment fait beaucoup de pas en avant depuis qu'elles s'étaient rencontrées toutes les deux. Elles avaient toutes les deux beaucoup avancées, et Anna était là pour les aider. Heureusement d'ailleurs, c'était un peu leur source de motivation quand elles n'arrivaient pas à se motiver l'une l'autre.  

Elle avait essayé de trouver les mots pour la réconforter. Elle pensait bien que Ayame voudrait retrouver sa voix, mais elle savait que ça ne reviendrait pas en un claquement de doigts. Et il était mieux de se concentrer sur les progrès qu'elle avait déjà fait plutôt que de voir ceux qu'elles n'avait pas encore accomplis. Enfin bon, Mia montrait la tisane à Ayame qui accepta volontiers de goûter .Mais avant ça Mia s'assit pour lire le message que lui écrivait Ayame. Elle lui sourit doucement. « Tu sais que j'essaierais toujours de trouver les mots pour t'aider .. Oui je vais la préparer. » Elle rit doucement et se releva pour se diriger vers la petite cuisine. Elle prit la bouilloire pour faire chauffer de l'eau et prépara les deux tasses.

Une fois les tisanes prêtes Mia retourna s'asseoir et posa les tasses sur sa table de nuit, qui était toujours suffisamment bien rangée pour accueillir une tasse au moins. Elle regarda alors Ayame et reprit le téléphone que lui tendait son ami, quoi, elle ne lui avait pas encore tout raconter ?  Elle avait donné de l'argent à un host pour le dédommager. Mia sourit en lisant que Ayame avança être pauvre. Elle le regarda. « Je sais que tu n'aime pas ça, mais si jamais tu as besoin de quelque chose tu n'hésite pas d'accord ? » Que ce soit pour faire des courses, ou pour se faire plaisir.  Mia était très généreuse et ce n'était pas l'argent qui lui manquait, même si ses parents surveillait ses dépenses. Elle aiderait tout de même son amie si celle ci en avait besoin. Et elle n'avait pas besoin d'y réfléchir pour en être certaine.

Oh alors c'était aussi un étudiant. Eh bien, on en apprend des choses. Elle avait donné son Line. Alors ça c'était un exploit ! Mia sourit en lui rendant son téléphone. « Tu lui as donné ton Line ? Mais c'est encore un énorme pas de plus ça  Aya ! Tu te rends compte. Toi qui donne ton line à un garçon ! Il a intérêt à être gentil avec toi . Sinon tu me le dis hein ! » Oui Mia espérait que ce garçon soit réellement gentil et qu'il n'ait pas juste fait semblant pour profiter de la gentillesse de Ayame.

Il était temps de chasser les idées noires et de laisser place au positif. Pendant que Mia préparait les tisanes, Ayame avait expliqué la suite de l’histoire par écrit, comme d’habitude. Elle était curieuse de voir la réaction de son amie face à la situation, car il fallait avouer que la jeune étudiante s’était vraiment surpassée par rapport à sa zone de confort habituelle. Après tout, elle n’avait jamais donné ses coordonnées à un garçon, encore moins quelqu’un qui travaillait dans le monde de la nuit, depuis l’agression. Mais ce jeune homme lui faisait de la peine. Elle ne prenait certainement pas en pitié, il faisait ce qu’il voulait de sa vie, mais il ne semblait pas en accord avec ses propres choix de vie et de carrière, son métier avait semblé lui paraître ennuyeux et désolant. Face à cela, Ayame qui était de nature généreuse et aidant son prochain, avait voulu faire un geste pour lui, pour le remercier. Elle lui avait aussi donné de l’argent pour le dédommager car elle n’était pas certaine qu’il accepterait de la recontacter de toute manière.

La réaction de Mia ne se fit pas attendre : la jeune fille fut largement étonnée des efforts fournis par son amie malgré ses réticences générales. Elle lui rappela que si elle avait besoin d’une quelconque aide financière, elle pourrait toujours la dépanner, ce à quoi Aya’ acquiesça avec un sourire, puis la félicita pour ce pas en avant. Elle espérait aussi qu’il serait gentil avec elle sinon gare à lui ! Ayame sourit et hocha à nouveau la tête. Elle se demandait si Mia pensait que ce garçon lui plaisait, parce que ce n’était absolument pas le cas ! Elle n’était même pas certaine de pouvoir un jour avoir une relation amoureuse avec un homme. Et, aussi étrange que cela puisse paraître, ces derniers temps Yuzu était souvent dans ses pensées … Elle n’en avait parlé à personne, ne comprenant pas pourquoi elle était obsédée par son amie, mais les faits étaient ce qu’ils étaient.

C’est vrai que c’est surprenant venant de moi www. Mais bon, franchement il avait l’air tellement dégoûté par son travail ! De toute façon je ne pense pas qu’il me recontactera, il avait l’air agacé de nature. Mais ça m’a donné de l’assurance, c’est déjà ça !

Ayame était tout de même fière de ce qu’elle avait accompli, même si la peur avait repris le dessus sur la fin et l’avait considérablement épuisée. Se confier à son amie au lieu de tourner en rond dans la chambre lui avait également fait du bien. Il fallait maintenant faire venir le sommeil avec la bonne tisane bien chaude. Aya’ prit d’ailleurs la tasse entre ses mains et avala quelques gorgées réconfortantes.

septembre 2019

Si on avait dit à Mia qu'un jour Ayame "discuterait" avec un garçon et lui donnerait son contact elle y aurait cru oui, mais pas aussi tôt, pas aussi vite sans l'année. Elle se doutait que le fait de se mêler aux autres, de reprendre un rythme de cours "normale" serait un changement énorme pour Ayame alors il faudrait déjà qu'elle s'habitude à ça avant de penser à autre chose. Mais Mia était fière de son amie. Elle était contente de voir qu'elle avançait, elle aussi. Qu'elle était sortie seule, rentré de nuit en réussissant à éviter une crise panique. Ayame avait vraiment fait un pas en avant. Et d'autant plus qu'elle avait du coup donné son contact à un étranger, un homme qui plus est.

Elle avait alors rapidement lu ce que Ayame ajouta et sourit. « Ah oui ... s'il est dans le monde de la nuit, ce n'est peut être pas un travail agréable, du mins j'imagine.. » Elle comprenait qu'il puisse être dégoûté par son travail. Même si Mia n'osait pas imaginer de quoi il s'agissait exactement, elle ne se doutait pas ce qu'il fallait faire. Et au fond, elle ne préférait pas le savoir. La jeune femme observa son amie. « Qui sait, peut être qu'il sera curieux de savoir qui tu es ! Et que dans un moment vous serez amis ? La vie est pleine de surprises ! » Elle rit un peu. Elle ne savait pas en réalité. Peut être oui qu'il ne la contactera pas, mais peut être que oui. Après, elle n'osait pas imaginer qu'ils puissent être plus que des amis, premièrement parce que ce n'était pas son genre, et puis elle ne voyait pas Ayame avec quelqu'un qui travaillait dans le monde de la nuit. Aussi gentil soit il.

L'étudiante posa le téléphone avant de prendre sa tasse de thé à son tour. Elle souffla un peu avant de boire une gorgée. Elle sourit ensuite à son amie. « Alors ? Tu aime ? » Si oui, alors Mia lui donnerait une boîte, comme elle le lui avait dit un peu plus tôt, sa mère lui en avait acheté plusieurs. Elle était un peu excessive par moment. « En tous cas, tu as eut un eut une journée pleine d'émotions ! J'espère que ça va t'aider à te calmer pour pouvoir bien dormir .. »

Les discussions entre Mia et Ayame, si l’on pouvait les nommer ainsi, étaient toujours bénéfiques pour les deux amies. C’était toujours très important lorsqu’on voulait progresser dans un domaine de partager ses réussites et ses petites victoires du quotidien. Certaines personnes préféraient rédiger dans un carnet leurs émotions à vif, mais Ayame appréciait aussi les retours de son entourage proche. Par entourage proche elle entendait bien sûr Mia, Anna, ses parents et plus récemment Yuzu.

Clairement, Mia avait raison, travailler dans le monde de la nuit ne devait pas être rose tous les jours, elle préférait ne pas y penser car ça la renvoyait à de trop mauvais souvenirs. Mais bon, même si elle ne connaissait même pas le prénom du jeune homme, elle espérait du fond du cœur que si c’était ce qu’il souhaitait, il réussirait à changer de voie de vie.

La jeune fille avait également souligné que la vie était pleine de surprises et que, contrairement à ce qu’Ayame pouvait imaginer, il reprendrait peut-être contact avec elle, et ils sympathiseraient. Elle, sympathiser avec un homme ? Très peu pour elle. Elle lui avait donné ses coordonnées davantage pour se faire pardonner de lui avoir fait perdre son temps et l’aider, que de nouer un quelconque lien avec lui. Surtout s’il travaillait dans le monde de la nuit, elle ne voulait pas avoir affaire, ni de près, ni de loin, à cet univers infesté de Yakuzas et de gens peu fréquentables.

On verra bien, mais je me vois très mal me retrouver mêlée, même indirectement, au monde de la nuit, et aux hommes en général tu sais.


Voilà ce qu’elle avait écrit pendant que Mia portait la tasse à ses lèvres pour goûter la tisane. Ayame avait beaucoup apprécié le goût léger et fruité de la tisane, et avant de tendre le téléphone à son amie pour lui montrer le message qu’elle avait tapé, elle rajouta sa réponse à sa dernière question :

Et oui j’aime beaucoup ta tisane ! C’est fruité mais léger, c’est super ! Je veux bien te piquer une boîte du coup. Et d’ailleurs je ne devrais pas tarder à aller dormir, il se fait tard et tu avais l’air prête à aller au lit aussi quand j’ai débarqué. Et comme tu dis, une journée pleine d’émotions aujourd’hui ! Pour se remettre de tout ça, il faudrait planifier une sortie prochainement … Pourquoi pas un tour à Kamakura et Enoshima pour aller à la plage ? Ou si tu as une idée !

La rentrée approchait et Ayame souhaitait profiter des derniers instants vacanciers avant de reprendre le chemin de l’école. Car une fois que les cours auraient repris, elle serait bien moins encline à aller vagabonder çà et là, même si elle ne s’empêcherait pas de sortir de temps à autre pour autant.