Une soirée comme Ken les détestait. Ce genre de soirées où il haïssait vraiment son statut de gosse de riche. Non mais sérieusement, quand est-ce que ses parents arrêteraient de le prendre pour le larbin de service sous prétexte qu’il avait le temps ? Car non, le temps il ne l’avait pas. Il avait les cours à l’université, de Commerce, à la demande de Mme Anzai. Il y avait les entraînements et les tournois de Basket, même si ceux-ci n’avaient pas encore repris car ce n’était pas encore la rentrée officielle à Chûô, la condition imposée par Ken à sa mère pour étudier à la fac aussi longtemps. Il y avait aussi la vie universitaire, car après tout, comme il vivait depuis deux ans à la résidence Seiseki, il participait activement aux événements organisés. Vivre à la demeure Anzai le débectait au plus haut point. Il avait réussi à négocier son émancipation après son année à vide avant son redoublement. C’était sa 3eme et dernière année à la résidence et il comptait bien en profiter à fond, ce qu’il avait déjà fait pendant un semestre.

Ce soir-là, Anzai le père lui avait téléphoné pour lui demander un service. Bah voyons. Les rares fois où il était en contact avec le prestigieux PDG, c’était pour rendre des services de toute façon. Une chance pour lui que ce soir Ken n’était pas d’astreinte au Lawson d’en face. Mais ça, son père s’en contrefichait, il lui aurait certainement dit qu’avec le fric qu’amassait sa famille, il n’avait pas besoin de ce baito. Mais pour Ken c’était important, pour son autonomie. Et puis si un jour il décidait d’abandonner la reprise de l’entreprise familiale et qu’il était déshérité, il ne serait pas tout à fait à la rue du coup.
Toujours était-il que M. Anzai avait besoin d’un document important de la part de l’un de ses clients, qui séjournait temporairement dans un hôtel à Ikebukuro. Et ce client ne répondait pas à ses appels. Du coup, il souhait que son cher fils débarque à l’hôtel en question et aille tambouriner à la porte dudit client jusqu’à ce que ce dernier ouvre. Tu parles d’un plan en or, et d’un respect d’autrui … ! Mais bon, il avait accepté.

C’était loin Ikebukuro ! Il fallait prendre le train jusqu’à Shinjuku, et effectuer un autre changement pour arriver à destination. Il n’était pas sorti de l’auberge, sérieusement. Non mais quelle idée d’avoir accepté aussi.
Il peina un peu à trouver l’hôtel, n’étant pas très doué en orientation, même avec Google Maps en main. Bon, au moins maintenant c’était chose faite. Il se rendit à la réception, demanda la chambre du client en prétextant que c’était pour une affaire importante et en fournissant les documents que son père lui avait scanné. L’hôtesse accepta de lui donner le numéro malgré l’heure tardive. Heureusement qu’elle était coopérative, Ken n’aurait pas apprécié l’heure et quart de trajet en train pour fichtrement rien. Il aurait certainement fini au bar ou au karaoké pour sauver la soirée, ou peut-être les deux.

L’entrevue avec le client se passa mieux que prévue. Etonnamment, ce dernier apprécia la gentillesse de Ken et le fait qu’il se soit excusé de se présenter à une telle heure. Il lui avait expliqué qu’il avait eu quelques complications concernant les fameux dossiers à fournir, et qu’il comptait les faire parvenir à son père le lendemain. Ken avait bien compris que c’était un mec véreux qui n’aurait eu aucune intention de coopérer si on n’était pas venu le voir jusqu’à son logement, et qu’il avait ouvert en pensant que c’était sûrement une femme qui venait lui tenir compagnie.

Ken sortit finalement de la chambre après lui avoir fait comprendre que c’était vraiment chiant pour lui d’être venu jusqu’ici – après avoir récupéré la paperasse bien évidemment. Après avoir fermé la porte, il allait repartir tranquillement quand quelque chose, ou plutôt quelqu’un, l’interpella. Il hallucinait ou il y avait un type nu comme un ver dans le couloir ?! Il eut à peine le temps d’analyser l’info que le type avait disparu. Soit il se cachait, soit Ken avait rêvé.
Un groupe de personnes arriva dans le couloir, et passa devant lui, l’ignorant totalement. Bien trop intrigué pour repartir sans faire son curieux, et devant de toute façon traverser le couloir pour rejoindre l’ascenseur, il se dirigea vers l’endroit où il pensait avoir aperçu le mec nu.
Et non, il n’avait pas rêvé, il le trouva là, dans un renfoncement du mur. Mais …

« Mais qu’est-ce que vous fichez ici à poil ?! Vous êtes au mauvais endroit pour jouer les exhibitionnistes … ! »

Il y avait vraiment des mecs dérangés à Tôkyô, ces dernières années.

Non mais sérieusement, il y avait de plus en plus d’ahuris et de gens bizarres de nos jours. Depuis l’apogée des réseaux sociaux, tout était bon pour attirer l’attention après tout. Y compris se retrouver nu dans le couloir d’un hôtel lambda. Il comptait faire quoi au final ? Se filmer avec son téléphone et balancer ça en story ou en live pour faire marrer les gens, comme un défi ? Non mais clairement, la société actuelle était pleine de surprises. De toute façon, l’inconnu était nu comme un ver et n’avait visiblement pas son téléphone sur lui, donc l’idée de se filmer était directement exclue. « Un problème de porte », qu’il lui dit. Ken haussa un sourcil et tourna son regard vers la porte de chambre la plus proche de là où il se trouvait. Effectivement, les portes de l’hôtel semblaient être de ce type qui se ferme tout seul d’un simple claquement. Oublier ses clefs à l’intérieur était donc la pire idée du monde. Et c’était visiblement ce qui venait de se passer pour ce type. La question était ? Qu’est-ce qu’il foutait à poil et surtout, pourquoi avait-il eu besoin de sortir nu dans le couloir ? Généralement quand on quittait une chambre d’hôtel, c’était soit pour aller manger un bout pas loin, soit pour rendre la chambre. Mais dans les deux cas, on portait un minimum de vêtements.

« Ce genre de portes est vraiment traître, j’avoue. Mais c’est quand même bizarre d’avoir voulu aller dans le couloir à poil, non ? »

Quand bien même il aurait été sous la douche et aurait entendu qu’on frappait à la porte, il aurait eu la lueur d’esprit de s’entourer d’une serviette, non ? Mais bon, vu comment il arborait fièrement ses attributs sans même se cacher de ses mains, ce n’était peut-être pas le genre de la maison que d’être pudique. Pourtant, Ken imaginait mal quelqu’un ouvrir à un invité ou un majordome totalement nu. Une histoire de femme alors ?

« Heureusement quand même que je ne suis pas gay, j’aurais pu vous sauter dessus direct, provocateur comme vous êtes. »

Ken ou toujours la blague pour rire. Je rectifie : la blague nulle qui peut potentiellement faire rire. Mais effectivement, aux dernières nouvelles, même si son prénom avait une certaine connotation du côté occidental du monde, il était parfaitement hétérosexuel, en tout cas jusqu’à preuve du contraire. Le sexe masculin ne l’avait absolument jamais attiré et cela se prouvait en ce moment même : il était totalement indifférent, juste à mi-chemin entre l’amusement et l’effarement.
Il se passa une main dans les cheveux. Il aurait dû partir en le laissant en galère mais ce n’était pas le genre de la maison. Alors il proposa :

« Je peux essayer d’aller chercher le double de la chambre à l’accueil si vous voulez, mais je ne suis pas sûr qu’on accepte de me la donner vu que je ne suis pas client. Une idée ? »

Ken mettait un point d’honneur à aider les galériens, quels qu’ils soient. L’autre soir, il avait rendu service en boîte à une jeune fille qui se faisait harceler par un mec bourré et voulait se coller à elle en permanence. Un bon samaritain ce petit Kenken.

Non mais sans rire, ces derniers temps Ken avait le don de se foutre dans des situations improbables. Entre la jeune Moana qui s’était agrippée à lui en soirée pour éviter de se faire emmerde par un mec relou, et ce type à poil dans le couloir d’un hôtel … Non mais il était loti notre ami ! Vraiment, il attirait les cas en ce moment. Mais il le valait bien.
Cependant, Ken soupçonnait l’inconnu de lui raconter des salades car sa situation était bien plus ridicule que ce qu’il y laissait paraître, et Ken ne croyait pas une seule seconde à l’histoire du téléphone. Il soupçonnait un plan cul qui avait mal tourné mais la vie privée des clients de l’hôtel de celui de son père ne le regardait pas. Il fit donc mine de croire au mensonge de l’homme nu, et se contenta de répondre un « je vois » des plus sobres.

La blague de Ken sur son statut sexuel fit mouche, et l’inconnu joua le jeu, lui répondant du tac au tac qu’au moins il n’aurait plus eu froid si tel avait été le cas, avant de le gratifier d’un clin d’œil appuyé. Oh merde, autant ce type était vraiment gay, ou bi. Dans quel pétrin s’était-il encore fourré. En plus le type était à poil et s’il avait décidé que Kenken était son type de gars, il le saurait … très vite. L’inconnu dut penser à la même chose puisqu’il se cacha aussitôt l’entrejambe de sa main et un énorme malaise s’installa entre eux.

L’inconnu semblait s’étonner de la présence du jeune homme ici alors qu’il n’était même pas client de l’hôtel. Non mais sérieusement, avec une situation comme la sienne, il s’offusquait du fait qu’il n’était pas client ? Incroyable. La raison de sa venue ne le regardait pas pour autant, et lui répondit un truc bateau :

« Affaires familiales, je fais le messager. »

Simple et efficace. C’est alors que l’inconnu lui demanda s’il pouvait emprunter son haut. Ouais, effectivement, il n’y avait pas pensé plus tôt, il pouvait bien lui prêter sa veste après tout. Il n’avait juste pas intérêt de se barrer avec par la suite, parce que c’était sa préférée. Il ôta donc le vêtement et se retrouva en T-shirt à manches courtes, révélant ses muscles saillants grâce aux nombreux entraînements de sport. Il tendit sa veste au jeune homme et lui sourit :

« Elle s’appelle reviens hein. Et elle tient chaud, contrairement à moi. »

Quelle situation déroutante quand même. En plus, cet inconnu n’avait de cesse de l’observer sous toutes ses coutures. Mais quel genre de questions obscènes était en train de lui traverser l’esprit à ce mec ? Ken était désemparé, debout face à un type à poil qui se cachait désespérément les parties intimes avec sa main, ayant vraiment l’air d’être sorti d’un scénario de mauvais film. Bref, la situation ne pouvait pas être plus malaisante et il espérait ne jamais retomber sur ce type un jour. S’il savait …

Il avait donc proposé de prêter sa veste en cuir rembourrée (ouais parce qu’en fait une veste de costard ça tient pas chaud du tout mdr) au jeune homme qui avait un gabarit plus petit que le sien. Ca lui permettrait sans doute de se couvrir un peu mieux. Et par contre s’il se pointait ainsi à la réception de l’hôtel, ça risquait d’être vraiment cocasse. Il voulait absolument voir ça, et il en riait d’avance.

La remarque déplacée du jeune homme quant à sa chaleur corporelle aurait pu faire grincer Ken des dents, il se contenta de pouffer en haussant les épaules. Mais ce qui le gênait davantage, c’était que l’inconnu semblait avoir la ferme intention de garder sa veste et de lui en offrir une autre. Non mais ça va ou quoi ? Il n’était pas gêné quand même ! Soupirant face à tant de désinvolture, le jeune héritier répondit :

« Si j’ai dit qu’elle s’appelait « reviens », ce n’est pas pour des clochettes. Oui j’aime cette veste et oui j’aimerais bien la revoir un jour. Il suffit de la laver et l’affaire sera réglée. Je ne vous dépanne pas pour me faire dépouiller de mes biens non plus. »

Il toisa le jeune homme qui avait désormais enfilé sa veste, et sortit son téléphone pour fournir ses coordonnées et prendre celles de l’inconnu.

« Voilà mon LINE. Vous m’écrirez plus tard pour me rendre ma veste, ok ? »

Bizarrement, il sentait qu’il ne reverrait jamais cette pièce de sa garde-robe. Elle avait une valeur sentimentale, et s’il oubliait, ça allait être la fête de ce type. C’était un cadeau de Ren, son meilleur ami, pour l’un de ses anniversaires, alors oui il comptait bien la récupérer.

« Et du coup maintenant je suis curieux de savoir comment vous allez procéder pour aller à la réception et obtenir gain de cause. Une idée peut-être ? »

Ce type était vraiment le plus improbable qu’il n’ait jamais rencontré. Ken avait du mal à le cerner, et n’aurait su dire s’il le trouvait amusant ou complètement exaspérant. Toujours est-il qu’il finit par comprendre que la veste avait de la valeur sentimentale à ses yeux et certifia de la lui rendre. Si les courbettes d’excuses étaient un peu de trop pour lui, sa suggestion quant au fait de récupérer ses affaires n’était pas sotte. En revanche, l’individu portant déjà sa veste, et étant nu comme un verre dessous, il se voyait mal fouiller ses poches à même le corps de ce dernier. Cela aurait été extrêmement malaisant, surtout si quelqu’un débarquait dans le couloir. Une chance que ça ne soit pas encore arrivé. Et une chance aussi qu’en ce mois chaud et humide de septembre, Ken soit sorti avec une veste en soirée. Non pas qu’il ait eu froid, mais il n’avait pas voulu apparaître trop débraillé devant le client de son père.

« Est-ce que je peux vous demander de vérifier mes poches ? Je n’ai pas très envie de vous fouiller, enfin vous comprenez ce que je veux dire. »

Pourquoi quand Ken était mal à l’aise, ses paroles pouvaient toujours avoir un double sens ? Il n’en savait fichtrement rien. Mais bon, c’était ainsi et ce n’était pas si grave après tout. Plus tard il rirait de bon cœur à cette histoire loufoque du mec nu dans les couloirs d’un hôtel.
Par la suite, Ken avait laissé ses coordonnées au jeune homme et ce dernier avait fait de même, soulignant qu’il risquait de lui envoyer par colis. Toujours plus, il n’avait pas spécialement envie que cet individu étrange connaisse son lieu de vie. Il n’aimait pas vraiment que les gens connaissent sa vie et son statut de gosse de riche qu’il détestait au plus haut point. Et il sentait que ce type allait oublier de lui renvoyer sa veste … Et même la résidence Seiseki à laquelle il logeait, il n’était pas fan à l’idée de le conduire jusque là-bas à vrai dire.

« Je préfèrerais la récupérer en main propre si possible. Je suis plus souvent à l’université qu’ailleurs, donc si c’est possible pour vous d’aller jusque là-bas ? Je suis à l’université Chûô. »

Quelle ne serait pas sa surprise quand il apprendrait que ce drôle de gosse était aussi étudiant sur le même campus ! Drôle de coïncidence après tout.
Finalement, Ken le curieux avait demandé au jeune homme ce qu’il comptait raconter à l’hôtesse d’accueil à la réception concernant son accoutrement. Il lui répondit du tac au tac qu’il parlerait d’un problème de douche, comme à lui. Et il ajouta que le client était roi de toute façon.

« Sauf votre respect, j’ai fait semblant de croire à votre histoire car votre vie privée ne me regarde pas, mais je crois autant à celle-ci qu’au Père Noël. Je ne suis pas sûr que la réceptionniste gobe votre histoire, et je vous souhaite qu’elle n’appelle pas la sécurité de l’hôtel pour signaler un exhibitionniste. »

Il rit, et ajouta :

« Mais si vous pensez que le client est roi, faites donc. Je me demande si je ne vais pas attendre ici pour voir si vous vous dépêtrez de votre situation, et comme ça si vous obtenez gain de cause, je pourrai récupérer ma veste … »

Il réfléchit un instant, consulta sa montre, et se corrigea :

« Mais il se fait tard, j’ai un entraînement à manager demain matin. Je vais donc récupérer le contenu de mes poches et filer, et je compte sur vous pour me rendre ma veste le plus vite possible ! »

HJ : je te laisse libre de conclure le rp ou de lancer un rebondissement en fonction de ce que tu veux, mais là on commence un peu à tourner en rond 