La respiration haletante, le coeur battant à mille à l'heure, Karu leva son pompon de la main droite, coinçant son poing gauche sur sa hanche dans la pose finale de leur chorégraphie. Nina les surveillait du regard, veillant à ce que toutes maitrisent les pas à la perfection et les guidant d'une main de maître. Karu avait souvent du mal avec son autorité, n'acceptait que peu ses critiques déguisées en conseils et voulait n'en faire qu'à sa tête, mais aujourd'hui s'était bien passé, et un sourire étirait les lèvres de tout le monde.
Enfin, Nina décréta que l'entrainement était terminé et tout le monde couru vers les vestiaires, excepté la capitaine et Karu, qui resta pour l'attendre. Reprenant son souffle, elle essuya sa sueur avec son pompon. Elle s'approcha de son amie en resserrant sa queue de cheval violette, puis s'éventa pour se rafraîchir un peu.
Tu veux nous tuer ? C'était super intensif aujourd'hui. Me demander de refaire cinq fois le salto c'était cruel !
Disant cela, elle pointa un index accusateur sur son amie. Même si elle savait que c'était pour l'aider à perfectionner ses saltos, elle avait faillit l'envoyer paître pour le cinquième, avant de s'exécuter. Elle n'était pas une marionnette qui obéissait aux ordres sur commandes, merde ! Mais bon, elle ne voulait pas créer encore plus de tensions et, pour le bien de l'équipe et de leur amitié, avait obéit sans broncher.
Elles prirent ensemble la direction des vestiaires, où les filles se battaient sûrement pour prendre leur douche en premier. Karu se fichait pas mal de la crasse, avait l'habitude du cambouis sur ses mains, alors elle laissait souvent les autres passer devant. Pas par sympathie, juste parce qu'elle en avait marre des cris de ces précieuses princesses qui refusaient de sentir la transpiration.
Et dis-moi, j'ai revu ce gars devant ta porte hier... Cheveux blonds, sourire niais, plutôt mignon. Y a un truc entre vous ?
Taquinant son amie, elle lui donna un petit coup de coude dans les côtes, levant ses sourcils en sous-entendus.
L’entrainement d’aujourd’hui se passait comme prévu et comme l’avait planifié la jeune capitaine. Il était vrai que Nina était l’une des plus jeunes de l’équipe et on se demandait bien pourquoi s’était elle qui était capitaine et non pas quelqu’un d’autre, quelqu’un d’un peu plus ancien quand même. Mais la jeune demoiselle avait surement quelque chose d’un peu plus pour être la capitaine. C’était une position qu’elle respectait et qu’elle ne léguera à personne d’autre temps qu’elle était encore dans la fac. La jeune demoiselle prenait l’équipe très au sérieux et tout comme les autres sport, elles n’étaient pas non plus sensé faire les jolies et sourire aux cameras et au public, mais il y avait bien des compétitions avec d’autres écoles, d’autres fac et surement des prix à gagner. Nina ne prenait pas ses responsabilités à la légère et par moment elle pouvait bien passer pour une capitaine tyrannique. La jeune étudiante voulait que tout soit parfaitement parfait. Pointilleuse, perfectionniste. Elle ne voulait voir aucun défaut. Nina n’était pas connue non plus pour garder les critiques pour elle, mais elle savait quand même donner des encouragements. Elle était telle une maman, même si c’était plutôt bizarre, mais les membres de l’équipe lui sont chers et s’en prendre à l’une était s’en prendre à elle personnellement.
Nina les regardait tel un aigle, voyant chaque pas, chaque mouvement. Elle contemplait la chorégraphie et secouait la tête, regardant par moment certaines personnes que d’autres puisqu’elles étaient le centre de ce qui se passait. Satisfaite finalement, elle tapa des mains pour leur dire que l’entrainement était enfin terminé et qu’elle pouvait aller se rafraichir et se reposer comme il le fallait, n’oubliant pas de mettre des glaçons sur leurs articulations.
La jeune capitaine s’était finalement retournée vers ses affaires pour prendre une petite serviette et essuyer aussi son visage, nouer de nouveau sa queue de cheval alors qu’elle entendit la voix d’Hikaru qui s’adressait bien sûr à elle. Les autres étaient parties en direction des vestiaires alors que son aînée avait fini par l’attendre. Nina cligna des yeux avant d’avoir un sourire « Mais tu n’es pas morte, n’est-ce pas ? » Elle la regarda de bas en haut un instant « Tu m’as l’air même en très bonne santé » Elle finit par remettre sa serviette dans son sac en lâchant un léger soupire, rangeant ses affaires « C’est en s’entrainant qu’on devient bon, tu devrais le savoir mieux que quiconque » Elle prit finalement son sac à dos pour se diriger à son tour en compagnie de la jeune demoiselle vers les vestiaires.
Il y aura surement la guerre pour le moment et Nina y était un peu habituée. Elle préférait laisser les autres passer en premier, sauf quand elle était vraiment pressée, ce qui n’était pas le cas aujourd’hui. Elle reçu le coup de coude alors qu’elle écouta ses paroles. Fronçant doucement les sourcils, elle la regarda de nouveau « C’est trop te demander de baisser la voix ? » Ce n’était pas les affaires des autres « Et tu me stalk now ? » Elle arque un sourcil « C’est juste... un ami » Elle détourna le regard alors qu’elle mit ses affaires finalement dans son casier, laissant le nécessaire pour se doucher et se changer « Et toi alors ? Avec ton petit ami... Ça va bien entre vous deux ? »
Non elle n’était pas morte, c’était évident, mais Karu sentait que un salto de plus l’aurait fait sortir de ses gonds. Comme toutes les filles, elle avait ses limites, et l’entrainement était déjà assez intensif que pour y rajouter ces sauts périlleux à répétition. Parfois, elle avait l’impression que Nina s’acharnait sur elle… et puis elle l’entendait crier sur une autre et elle se consolait rapidement. Elle haussa les épaules aux remarques de sa capitaine. Le crédo comme quoi il fallait s’entrainer pour s’améliorer, elle le connaissait par cœur, mais ce n’était pas une raison pour s’en servir d’excuse et tuer les filles.
Et c’est aussi en abusant qu’on se froisse les muscles, non ?
Elle râlait un peu, c’était vrai, mais elle avait le droit, non ? Elle était l’amie de Nina, ne craignait pas, ou plus, ses remontrances et savait que sous son masque de fer se cachait un cœur. La capitaine lui avait montré le sien au moment du scandale, prenant le temps d’avoir sa version de l’histoire et l’écoutant au lieu de l’accuser.
Les deux filles prirent ensuite la direction des casiers, et Karu embêta son amie, lui parlant de ce mec qu’elle avait vu quelques fois devant sa chambre à la résidence. Il était mignon, il fallait bien le dire, et elle sentait qu’il y avait un truc. De une, Nina ne lui avait jamais parlé d’un ami qui venait étudier dans sa chambre, il venait toujours en mode discrétion et avait l’air mal à l’aise, comme s’il savait qu’il ne devait pas être là. De deux, la réaction de la capitaine lui prouva qu’il y avait anguille sous roche.
Elle éclata de rire quand elle lui demanda de parler plus bas, l’accusant de la stalker. Tout de suite les grands mots ! Et préciser qu’il était juste un ami, c’était la grillade extrême. Karu hocha la tête en souriant, n’étant pas dupe. Il y avait un truc, c’était certain, et elle le saurait bien vite. Elle prit ses affaires dans son casier pendant que Nina changeait de sujet pour parler de Youta et elle.
Un pur bonheur, merci ! J’espère que tu vivras pareil avec monsieur Blondinet.
Un clin d’œil, une langue tirée, et Karu se dirigea vers une douche libre pour rincer la sueur de sa peau. Nina n’était pas au courant de sa fausse relation avec Youta bien sûr, personne ne l’était, et lui mentir faisait mal à la jeune fille, mais c’était nécessaire. S’il apprenait qu’elle avait révélé son secret à qui que ce soit, c’en était fini de ses chèques…
Après une douche rapide, elle retourna dans les vestiaires pour enfiler ses fringues, un pantalon de sport large et un pull noir sous sa veste de cheerleader. Elle était en train de lacer ses baskets quand Nina refit son apparition, et elle ne pu s’empêcher de relancer le sujet, un peu trop curieuse quand il s’agissait des affaires des autres.
Et il a un nom ton… ami ? Ou je continue à l’appeler le Sexy Blondinet ? D’ailleurs, s’il est libre, je tenterais bien ma chance, t’en penses quoi ? Faut juste que Youta l’apprenne pas, bien sûr, mais c’est faisable.
Karu parlait innocemment, comme si elles causaient météo ou cours. Elle espérait bien faire réagir Nina, la forcer à se balancer elle-même et obtenir tous les potins concernant ses histoires de cœur. Parce que, sérieux, elle restait une fille, et ce genre de choses intéressaient toutes les filles.
Nina savait parfaitement ce qu’elle faisait et puis ce n’était pas comme si elle n’était pas assistée par le coach. La jeune demoiselle était toujours en contact avec celle-ci pour voir quoi faire durant les entrainements, mais il fallait surtout aussi faire la nouvelle chorégraphie pour l’équipe. La jeune demoiselle avait un emploi de temps qui commençait à être chargé, mais ça ne la dérangeait pas vraiment. Elle faisait ce qu’elle aimait, du moins en ce qui concerne ce club et si elle pouvait déjà sécher toutes les classes chaque jour rien que pour être là, elle le ferait. Décidemment, ces études commençaient à la peser un peu et elle se demandait jusqu’où elle comptait bien aller. Les paroles d’Aki n’avaient quand même pas quitté son esprit et elle y songeait de plus en plus. Mais pour le moment, elle avait aussi des obligations ici et ne pouvait simplement pas lâcher ses responsabilités. Trop de choses en même temps, c’était frustrant.
Et il semblerait qu’une certaine personne ne soit pas de bonne humeur aujourd’hui, surtout après l’entrainement. Nina ne voyait pas vraiment de quoi elle parlait puisque de toute façon, elle n’était pas là pour les tuer. La jeune demoiselle rangea ses affaires tout en écoutant les plaintes de son amie « Si un jour ton copain te quitte je sais pourquoi » N’avait-elle pas mieux à faire que de se plaindre tout le temps ? « Et non, ça risque pas d’arriver. Je ne suis pas là pour vous tuer quand même, tu devrais le savoir » C’était un sujet qu’elle avait déjà dit et redit à plusieurs reprises. Si les autres pensaient qu’elles étaient là juste pour la popularité et d’être vu par les garçons, alors elles se trompaient. Ce n’était pas juste pour le fun, mais il fallait aussi être un minimum sérieux et les entrainements étaient assez importants. Et ce n’était pas en faisant la jolie que ça risquait d’avancer et qu’elles gagneront contre d’autres adversaires.
Nina ne se mêlait pas vraiment de la vie amoureuse de Karu tout simplement parce que ça ne la regardait pas. La jeune demoiselle savait toutefois qu’elle n’avait pas non plus vécu les meilleurs jours ici avec le scandale et ce mec qui clairement était un pur abruti. La capitaine regarda Karu avec un sourire, surement ironique, lorsqu’elle lui souhaita de vivre un jour pareil. Elle ne savait vraiment si elle était contente, mais Nina se disait qu’elle était assez grande pour se débrouiller et savoir ce qu’elle voulait vraiment. Ce n’était pas un secret pour tout le monde leur relation, mais si en plus elle voulait impliquer Taeyang dans cette conversation... Nina n’était pas du tout d’accord.
Elle finit par avancer pour son tour et prit une douche tranquillement, se détendant après un long entrainement. La jeune demoiselle pensait qu’elle allait sortir de nouveau sans soucis, sans relancer ce sujet tout simplement con, mais Karu pensait le contraire. Nina lâcha un soupire alors qu’elle ferme le casier, ayant entendu la demoiselle jusqu’au bout. Elle se changea en attendant qu’elle termine de dire des bêtises « Je pensais que tu vivais l’amour fou avec Youta, alors pourquoi avoir des vus sur quelqu’un d’autre ? Les rumeurs seraient-elle vrai, ma chère Karu » Son ton restait ironique, mais si en plus elle voulait s’aventurer dans un terrain qui n’était pas sien. Elle finit par fermer son casier plutôt rudement avant de se baisser pour porter ses chaussures « Et blondinet comme tu le dis n’est pas un jouet. Alors je te conseille de rester loin » Elle se redresse une fois terminée pour prendre son sac et regarder la jeune demoiselle « Tu devrais mieux te contenter de satisfaire ton copain »
Karu ricana aux paroles de Nina, comme quoi elle comprendrait si Youta la larguait. Ah si tu savais ! Le jour de leur séparation n'était pas prévue pour bientôt, tous les deux satisfaits de leur petit arrangement. Certes, ils se détestaient et se dégoûtaient, mais lui avait la garantie que son secret était au chaud et elle avait un porte-feuille bien rempli et une réputation en or. Alors non, il ne la quitterait pas, pas avant un moment, en tout cas.
Elle haussa les épaules à la dernière réplique de son amie avant qu'elles ne partent aux vestiaires. Oui Nina ne voulait pas les tuer, mais elle était jeune et ne connaissait pas bien les limites de ses filles. Mais bon, c'était elle la capitaine, alors Karu n'insista pas, lui souriant et s'inclinant légèrement.
Oui cap'taine !
Elles commencèrent ensuite une discussion sur le garçon que Karu avait vu deux ou trois fois devant la chambre de Nina, le blondinet assez mignon qui semblait toujours mal à l'aise quand il se faisait choper. Mais Karu n'était pas une balance et n'avait jamais prévenu le Manager que son amie invitait un mec dans sa piaule. En fait, elle s'amusait même à le gêner encore plus avec un sourire ou un clin d'oeil complice, du genre de ceux qui veulent dire "t'inquiètes, j'vous couvre".
Puis elles allèrent se doucher et Karu relança le sujet au retour d'une Nina de moyennement bonne humeur. Cette fille était d'un susceptible parfois ! La plus âgée voulait juste des potins, discuter garçons entre copines, mais la capitaine ne semblait pas de cet avis et prit plutôt mal sa plaisanterie.
Hé calme-toi, c'était une blague ! Je te le laisse le blond, j'suis très bien avec le mien.
Soupirant, elle termina de nouer ses lacets au moment où Nina lui conseilla de mieux satisfaire son copain, ce qui eut pour effet de l'énerver à son tour. De quoi parlait-elle ? Youta avait ce qu'il voulait, ce qu'il lui demandait. Il n'avait pas à se plaindre mais, si elle disait ça, c'était qu'il avait parlé, non ? De quoi ? À qui ? Se levant, elle rangea ses affaires dans son casier et croisa les bras.
C'est méchant. Je voulais juste plaisanter, mais t'es d'humeur garce alors je vais en rester là. À demain capitaine.
Ayant perdu toute envie de rire et de partager des ragots avec sa copine, elle enfila sa veste et attrapa son sac avant de se diriger vers la sortie d'un pas rageur. Si on ne pouvait même plus plaisanter avec ses amies ! Mais bon, si c'était ce que Nina voulait, Karu ne se mêlerait plus de sa vie et lui parlerait simplement de cheerleader à capitaine...
L’entrainement et comme celui-ci se passait n’était pas à discuter. Même Nina devait faire les mêmes efforts que les autres et ce n’était pas parce qu’elle était la capitaine qu’elle était privilégiée, au contraire. C’est surement parce qu’elle était capitaine qu’elle avait encore bien plus de responsabilités que les autres, qu’elle devait s’entrainer encore bien plus que les autres. La jeune russe en était habituée surtout lorsqu’elle faisait de la gymnastique, disons que les instituts là-bas n’étaient pas aussi douillettes qu’ici, les entrainements étaient bien plus corsés qu’ici et elle se disait que les autres devaient s’estimer heureuses de ne pas vivre ce qu’elle avait bien pu vivre dans son pays natal. Surement qu’elles ne tiendraient pas le rythme et c’était surement pour ça que Nina était bien plus strict sur les entrainements. Alors non, ce n’était pas un entrainement pour que les filles fassent les jolis cœurs et poser comme des objets en fasse du public ou la camera.
Nina avait pris ses affaires et s’était donc dirigée vers les vestiaires. Elle ne pensait pas qu’elle aurait pu voir Taeyang rentrer chez elle, mais maintenant qu’elle le savait, elle devra lui dire de faire un peu plus attention lorsqu’il venait la voir. Si Hikaru l’avait vu alors peut-être que quelqu’un d’autre pourrait faire la même chose. Nina lâcha simplement un léger soupire alors qu’elle y repensait. Elle espérait quand même que Karu allait lâcher l’affaire, surtout vu comment elle parlait de lui. La douche la rafraichit et finalement elle se change et sèche ses cheveux encore un peu mouillés avant de commencer à ranger ses affaires. Malheureusement, Karu était encore bien plus curieuse et parlait de lui comme s’il accepterait de toute de sortir avec elle. Non pas qu’elle n’avait pas ce qui plaisait aux garçons, mais disons que Taeyang était une limite à franchir. Elle qui pensait qu’elle aimait son petit ami, voilà une discussion bien louche. Elle fronça les sourcils alors qu’elle lui dit que c’était une simple blague. Blague qu’elle ne trouvait vraiment pas drôle. Peut-être était-ce la jalousie qui parlait ? Mais Nina n’avait pas eu l’envie d’en rire.
Elle finit par fermer son casier et prendre son sac tout en lui envoyant ce qu’elle pensait en pleine figure. Nina n’était pas connue être la plus chaleureuse surtout lorsqu’elle disait ce qu’elle pensait franchement, elle n’avait pas de filtre, elle ne ferait jamais semblant d’aimer quelqu’un alors qu’au fond elle détestait la personne. Ses critiques pouvaient bien être piquantes et ses paroles assez dures. Hikaru n’avait pas non plus aimé ce qu’elle venait d’entendre et c’était tout à son honneur. Ou pas. Nina était quand même restée sur ce qu’elle disait. « Je crois que tu as oublié où sont tes limites, pour une simple blague » Une blague était sensée être drôle, non ? Alors pourquoi elle n’en riait pas ?
Elle posa son sac sur son dos et lâcha un soupire en voyant Hikaru bouder et partir. Elle roula des yeux alors qu’elle ferma la porte des vestiaire finalement tout en la suivant vers la sortie « Si tu as des problèmes avec ton copain faut le dire tu sais » Peut-être qu’elle songeait vraiment à aller avec quelqu’un d’autre mais ne voulait pas l’admettre ? Si c’était réellement une blague alors la russe ne l’avait pas vraiment compris « Il n’est jamais bon de rester avec quelqu’un qu’on aime pas, quelles qu’en soit les raisons »
Mentir à tout le monde commençait à sérieusement peser sur les épaules de Karu. Elle savait que c'était nécessaire, que c'était comme ça qu'elle gagnait son argent de poche et pouvait s'acheter ses bouquins et ses outils, qu'elle rendait service à un gars jusqu'à ce qu'il soit prêt à faire son coming-out. Mais elle en pouvait plus. Sa mère, ses amis, ses cousins, tout le monde la croyait heureuse en amour avec ce mec qu'elle détestait, et elle pouvait rien dire.
En plus de ça, elle devait supporter tous les jours les humeurs de Youta, ses commentaires désobligeants, ses insultes. Alors elle avait sa dose, n'avait plus la patience pour les humeurs de Nina. Les deux filles avaient un fort caractère, ça pétait souvent entre elles, mais aujourd'hui Karu n'avait même pas envie de s'engueuler. Elle était tout simplement épuisée, fatiguée de tout. Alors elle salua sa capitaine et sorti des vestiaires dans l'idée de rentrer chez elle au calme.
Mais c'était sans compter sur la capitaine qui voulait terminer cette conversation, la suivant dans les couloirs pour relancer la conversation. Elle savait rien, elle pouvait pas comprendre. Karu n'aurait pas du lui en vouloir, c'était elle qui l'avait cherchée, mais elle voulait juste discuter avec une amie, pas lancer une dispute. Elle savait bien qu'elle était pas douée pour les amitiés féminines, s'étant toujours mieux entendue avec les mecs, mais elle ne leur faisait plus confiance, alors vers qui se tourner, hein ?
Soupirant, Karu s'arrêta et se retourna vers Nina, le visage dénue de toute émotion. Elle n'en pouvait plus de mentir, mais que pouvait-elle faire ? Dire la vérité ? Non, c'était inconcevable... Faire ça était risquer que tout le bahut finisse au courant et que leur arrangement tombe à l'eau. Elle serait soulagée oui, n'aurait plus à passer du temps avec lui, mais sa réputation serait de nouveau massacrée et elle perdrait sa banque. Elle pouvait pas en parler, tout simplement.
Mêles-toi de tes affaires tu veux ? Pourquoi je te parlerais de ma vie sentimentale alors que toi tu me dis rien ?
Nina avait été claire, elle ne voulait pas lui parler du blondinet alors que ça crevait les yeux qu'il y avait un truc. Alors pourquoi elle se confierait ? De ce qu'elle se souvenait, l'amitié allait dans les deux sens, si Nina ne lui faisait pas assez confiance pour lui parler, alors pourquoi Karu lui ferait-elle confiance ?
Je suis fatiguée, je veux juste rentrer.
Fatiguée de tout, de ses mensonges, de ses disputes avec tout le monde, de sa solitude. Elle ne reconnaissait plus la fille qu'elle était indépendante, pleine de joie de vivre, la fille qui mettait les mains dans le cambouis et se fichait du regard des autres. Cette fille était partie avec son père voilà trois ans, et il ne restait qu'une coquille vide, remplie de mensonges et de faux-semblants.
Après une longue journée, avoir une dispute avec Hikaru était surement la dernière chose qu’elle voulait avoir. Pourtant, les choses ne se passaient jamais comme on les prévoyait et la tension était bien présente entre les deux filles. Premièrement parlant de l’entrainement, mais ensuite voilà qu’elle abordait le sujet de Taeyang alors que ça venait de nulle part. La jeune demoiselle n’avait pas non plus aimé la blague qu’elle lui avait faite, surement parce qu’elle ne pouvait pas imaginer quelque chose du genre arriver. Nina était peut-être un peu trop jalouse, peut-être qu’elle ne pourrait tout simplement pas voir une autre personne roder autour de ce blondinet. Un vrai rayon de soleil qui illuminait désormais ses journées qui étaient bien sombres durant des années.
Elle ne voulait pas non plus qu’Hikaru soit fâchée contre elle, contre cette façon de parler. Nina pouvait quand même voir qu’il y avait quelque chose qui la dérangeait, si elle avait ce genre de pensée... Il y avait quelque chose qu’elle ne savait pas non plus et elle ne savait si elle saura ce que Karu pouvait bien cacher, mais Nina pouvait tout de même essayer. Elle avait été là pour elle lorsque ce connard lui avait fait du mal, alors pourquoi ne pourrait-elle pas être là lorsqu’elle avait le plus besoin d’elle ? Mais si elle non plus ne lui disait rien, alors Nina ne pourrait pas savoir ce qui se passe. Elle n’était tout simplement pas medium, elle ne pouvait pas savoir ce qui se passe sans qu’on le lui dise.
La jeune russe finit par se redresser, lâchant un soupire suite à son commentaire. Elle semblait être aussi fatiguée et Nina pouvait très bien comprendre. Elle dévia un instant son regard sur le sol avant de finalement la regarder de nouveau... S’il fallait le faire, alors oui... Elle le dira. Au moins à Hikaru. « Je l’aime » Dit-elle franche, sans même hésiter « J’aime Taeyang, et c’est la seule vérité que je connais depuis maintenant des années... » Sa vie n’était pas non plus blanche, avec sa mère, son beau-père... Les mensonges qui rodaient autour d’elle. Mais une seule chose lui était sincère, une seule chose était la vérité absolue... Elle l’aimait.
Elle finit par aller à sa hauteur, lui pousser doucement l’épaule avec le sien, signe affectif « On rentre ensemble alors. Tu veux pas qu’on passe à un café avant ? Un thé ne serait pas de refus » Elle lui sourit doucement. Après une longue journée et un entrainement comme celui-là, elles avaient besoin de se reposer.
Karu était sur le point de tourner les talons et partir quand Nina reprit la parole. Elle se confia à propos du blondinet, un dénommé Taeyang. Elle l'aimait. Un sourire étira les lèvres de la jeune fille, mélange de joie et d'envie, heureuse pour son amie mais voulant la même chose pour elle. Quitte à avoir un mec dans sa vie, autant l'aimer, non ? L'apprécier, au minimum, avoir de la sympathie pour lui, n'importe quoi qui lui apporterait un semblant de joie et de sourire. Elle hocha la tête, la remerciant pour la confidence.
Il est mignon, vous allez bien ensemble.
Elle n'y toucherait pas, évidemment, n'en avait pas envie. Il était joli garçon, c'était vrai, mais pas son genre. Trop sage, trop mignon. L'opposé de Youta, et pourtant il ne lui conviendrait pas non plus. Karu hocha de nouveau la tête à la proposition de Nina, acceptant de rentrer avec elle et de passer prendre un thé dans un café. Enfin, elle prendrait plus vite de la caféine mais le principe restait le même. Enfonçant les mains dans ses poches, elle retourna à son amie la bourrade d'épaule puis marcha à ses côtés, se dirigeant vers la sortie.
Karu garda le silence un moment, ne sachant pas trop par où commencer et, surtout, craignant de recommencer à pleurer, comme quand elle avait revu Alex. Devait-elle se confier, de nouveau briser le secret et le révéler à une personne de plus ? Elle avait confiance en eux, mais plus elle en parlait, plus elle prenait des risques. Si ça venait à se savoir... Enfin, Nina avait eu le courage de lui parler alors elle pouvait lui retourner la politesse, elle le lui devait.
Youta et moi... c'est la plus grosse farce de l'année. On sort ensemble pour le public, pour que les mecs me foutent la paix et parce que je connais son secret. Je ne l'aime pas et je ne l'aimerai jamais. J'ai juste... besoin de lui, et il avait besoin de quelqu'un pour jouer le rôle de sa copine.
Honteuse, elle baissa les yeux alors qu'elle sortait du batiment. L'air froid s'engouffra dans ses cheveux, dans son manteau, la faisant frissonner. Contrairement à Alex, elle avait peur de la réaction de Nina, se doutait qu'elle serait contre, qu'elle voudrait qu'elle arrête, voudrait peut-être même la sortir de là elle-même. Mais elle ne pouvait pas arrêter, ne le voulait pas. Elle détestait cette situation, mais elle en avait besoin. C'était grâce à cet argent qu'elle payait la résidence, ses pièces de mécano, ses repas. Sa mère contribuait, mais Karu baissait volontairement les sommes qu'elle lui demandait pour ne pas la ruiner, sachant bien qu'elle avait parfois du mal à joindre les deux bouts.
Je suis désolée de t'avoir rien dit mais j'avais honte. Et puis j'imagine que tu ne m'aurais pas encouragée à le faire alors...
Elle haussa un peu les épaules, comme pour minimiser ses paroles, comme si c'était pas grave. Elle était malheureuse, mais au moins elle avait du pain dans ses placards et sa mère gardait son argent pour elle. Quant à plumer Youta, ça ne lui faisait ni chaud ni froid, tout comme lui se fichait de la blesser en l'insultant ou se moquant d'elle.
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